EIFFEL Stupor et tremblements

Eiffel stupor machine chroniqueEiffel, nouvel album Stupor Machine (le 26 avril Le Label [PIAS])

On n’aime pas Eiffel.

Sans doute parce qu’il est arrivé sur la scène à peu près en même temps qu’une floppée de groupes rock chantant en français de plutôt mauvais goût, plutôt mauvais tout court aussi. Alors, comme on était jeunes et cons (vous ne l’aviez pas vu venir celui-là), nous avons boudé ce groupe. Il ne nous intéressait pas, et puis il y avait déjà Noir Dés’, même si plus pour très longtemps.

Alors Eiffel, on n’a rien écouté d’eux. Parce qu’on nous gavait avec Luke, ou des trucs pas bons comme Deportivo. Et nous, nous avons rangé le groupe dans la même catégorie. Et puis Cantat a déconné, on ne parlait que de ça. Alors Eiffel, vous pensez bien… Rien à foutre.

Et puis le rock en français, ça manque quand même de chien. Y a qui ? Téléphone. Ouais. Noir Désir, ok. Trust, à la rigueur. Sinon, du keupon. Mais les groupes rocks, aux abonnés absents le plus souvent. Du coup, dur d’adhérer à Eiffel. Et de toute façon, nous avions décidé que ce groupe ne nous intéressait pas, parce que c’est comme ça et que c’était gravé dans notre marbre intérieur.

Carrière dont on ne sait.

Inutile que nous n’avons rien suivi de la carrière d’Eiffel. Nous pensions même qu’il avait disparu en même temps que Kyo. Alors quand nous recevons Stupor Machine, la surprise pointe. Tiens, il existe encore ce groupe ? Direction Wikipédia (ben ouais, on a des sources pourries parfois) et on découvre une carrière relativement atypique, avec deux albums coup sur coup (le groupe avait donc des choses à dire ?), un break, puis trois albums régulièrement espacés, puis re-break. Jusqu’à Stupor Machine donc.

Nous nous disons que le groupe a dû traverser son petit désert. Pas de quoi nous emballer plus que ça, mais ça nous le rend un chouia sympathique. Parce que nous sommes vils et mesquins surtout. Et puis, nous disons-nous, méchants que nous sommes, ça a dû servir la cause de leur rock mainstream (oui on vous a dit qu’on n’aime pas Eiffel) !

Stupor Machine.

Du coup, la galette parvient chez nous. On mate la pochette avec un visuel sobre, élégant. Pas de quoi se relever la nuit mais ça reste évocateur d’un peu de bon goût. Pas suffisant pour nous donner envie d’écouter le disque que nous le plaçons sur notre PDÉ (Pile de Disques à Écouter), nous disant qu’on verra ça le temps venu (ou pas du tout si jamais nous sommes trop débordés, ce que nous sommes toujours).

Le disque sort le 26 avril. Nous avons tout notre temps, on le laisse moisir tranquille dans son coin. La PDÉ diminue petit à petit, chronologiquement. Stupor Machine refait surface, on le remise en dessous (pas envie pas envie pas envie). Mais bon, y a un moment où il faut être pro, alors, dans un geste suicidaire, nous plaçons le Cd dans le lecteur.

Surprise.

Nous rédigeons une chronique pendant que les pistes s’enchainent. On ne vomit pas (première surprise). Nous y prenons même un peu de plaisir (deuxième surprise). N’y aurait-il pas un ou deux trucs à sauver dans le tas ? Les 13 titres s’achèvent, puis reprennent, tandis que la chronique que nous rédigions sur un autre groupe reste en rade. Bizarre. On nous aurait menti ? Eiffel vaudrait quelque chose ?

Ben ouais. Nous sommes les premiers décontenancés par cette révélation. Le son est bon, la prod au diapason. Ça reste du rock en tout cas, pas mainstream (on a vraiment un mauvais esprit de merde, pardonnez-nous l’expression), avec quelques bons riffs bien sentis (enfin une bonne tripotée en vrai) , de bonnes petites grattes électriques, une bonne pêche de batterie, sans que ça ne tartine dans tous les coins, deux ou trois petites bidouilles électroniques, et même des claviers bien sentis (piano aussi, qui donnent un effet apaisant, romantic’rock) . Le dosage est plutôt bon, ni trop, ni trop peu, juste ce qu’il, faut quand il faut.

Il faut dire que…

Il faut dire que la tracklist est super bien foutue. Elle est cohérente, alterne les climats, entre morceaux énervés et d’autres plus calmes, entre musiques et paroles. C’est plutôt malin pour un groupe que nous snobions par pure bêtise et préjugés. Mais bon, ça vaut le coup de se relever la nuit ou pas ?

Ça nous écorche les babines mais oui un peu quand même. Parce qu’il faut dire, et avouer aussi, que c’est là où nous attendions le moins Eiffel qu’il nous cueille de plein fouet : les paroles. Alors oui, on ne comprend pas tout parce que ça jongle avec les mots, avec les consonances, ça fait des jeux de mots, ça cartonne pas mal (et ça demande de réécouter le disque plusieurs fois pour saisir les nuances du propos), ça donne un rythme complémentaire à la musique, quelque chose finalement d’assez unique et vraiment pas dégueulasse. Et pour accompagner ces paroles il faut une voix qui va bien, et sans en faire tout un plat, celle de Romain Humeau colle parfaitement, idéalement, au bouzin. Agressive ou pas, elle s’accorde à merveille avec l’ensemble des autres instruments et de la musicalité du disque. Et puis, elle a un truc d’éternel adolescent qui nous botte bien !

…nous avions tort.

Alors bon, comment ça s’appelle déjà… Ah oui ! un mea culpa. Nous ne savons pas si Stupor Machine est le meilleur disque du combo (sans doute que non étant donné qu’il s’agit de leur sixième LP et qu’en général les meilleurs disques arrivent un peu plus tôt dans la carrière d’un groupe), mais il est sûrement un bon disque de rock, à ranger dans la catégorie des très bons disques de rock à la française.

Donc c’est la queue entre les jambes, la tête basse, mais avec cette certitude que seuls les cons ne changent pas d’avis, que nous en venons à nous dire, pour conclure, que contre toute attente, et sans grand suspens,

Eiffel on aime bien.

Site officiel d’Eiffel ICI

Du rock par ICI

Comments (9)

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    tgu

    comment avez vous pu passer a coté de ce groupe!!!!
    Sombre, milliardaire, t’a tout tu profites de rien,libre,et tant d’autre…
    j’ai 56 boules au compteur, et Nondedieu de Bordel de Merde : eiffel, c’est cool, super cool

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      Patrick Beguinel

      Merci pour le commentaire. Comme nous le disons dans la chronique, seul les cons ne changent pas d’avis. Nous avons pêché par quoi ? Orgueil? Ignorance ? Stupor Machine nous remet la tête dans le bon sens et l’exploration de ce groupe, dont nous comptons bien remonter aux origines, a déjà commencé ! Mieux vaut tard que jamais quoi !

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    Do

    En commençant la lecture de cet article, je me suis dit que je ne pourrais pas aller au bout… Comment ça, « On n’aime pas Eiffel! »?… Le « on était jeunes et cons » m’a redonné une lueur d’espoir… je voyais poindre l’issue… et alors que je pensais qu’il n’y avait que les cons qui ne changent pas d’avis, vous m’avez réconciliée avec vous-mêmes en vous l’avouant… Que de temps à rattraper , quelle chance et quel plaisir vous pourrez offrir à vos oreilles et à votre coeur en découvrant les pépites que renferment leurs albums précédents! Toujours égaux à eux-mêmes depuis presque vingt ans… Cohérents! On aime ou pas… mais non sans avoir écouté!… Moi, j’ADORE! Trois jours d’affilée que j’écoute « Stupor machine » en boucle sans m’en lasser!!!

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      Patrick Beguinel

      Merci pour le commentaire. Effectivement, reconnaitre qu’on est con nous fait paraître déjà moins con. J’ai revu mon jugement sur le groupe avec cet album que j’ai trouvé surprenant et très riche.

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        Do

        A la relecture de mon commentaire, je me rends compte que j’ai pu paraître sèche et je vous prie de m’en excuser… Il y avait une grosse dose d’humour que cachait la neutralité de mots écrits sur un écran blanc, sans sentiments visibles hors celui que j’aime beaucoup ce groupe! Mille excuses… Je n’ai pas voulu vous blesser!
        PS: J’aurais dû émailler mon commentaire de quelques smileys! 😉

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          Patrick Beguinel

          Aucun soucis, j’avais parfaitement saisie la nuance humoristique. En y répondant de la sorte, j’accentuais la chose. J’aime bien ce genre de trait d’esprit. Ma réponse s’inscrivait dans cette veine, mais il est vrai que par écrit parfois, ça peut tomber à côté. Donc pas de soucis, pas de blessures ni quoi que se soit sans approchant 🙂

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    Do

    En commençant la lecture de cet article, je me suis dit que je ne pourrais pas aller au bout… Comment ça, « On n’aime pas Eiffel! »?… Le « on était jeunes et cons » m’a redonné une lueur d’espoir… je voyais poindre l’issue… et alors que je pensais qu’il n’y avait que les cons qui ne changent pas d’avis, vous m’avez réconciliée avec vous-mêmes en vous l’avouant… Que de temps à rattraper , quelle chance et quel plaisir vous pourrez offrir à vos oreilles et à votre coeur en découvrant les pépites que renferment leurs albums précédents! Toujours égaux à eux-mêmes depuis presque vingt ans… Cohérents! On aime ou pas mais non sans avoir écouté!… Moi, j’ADORE! Trois jours d’affilée que j’écoute Stupor machine en boucle sans m’en lasser!!!

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    Glob Rocker

    C’est bien de découvrir Eiffel et le travail de Humeau avec cet album. Il faut par contre que ce soit le déclencheur d’envie de découvrir le travail passé. Le problème avec cet album pour ceux qui suivent le groupe depuis 2000 c’est que ça devient redondant et pour cause, Eiffel c’est Romain Humeau et Romain Humeau c’est Eiffel. Alors quand, comme moi, vous écoutez les deux, à la longue c’est toujours un peu la même chose. Alors ce Stupor Machine ne m’a pas stupéfait mais surtout donné envie d’écouter les anciens albums parce qu’Eiffel c’était mieux avant.

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      Patrick Beguinel

      Et merci également pour ce commentaire ! Je crois que ce que vous évoquez est d’une façon général « normale » pour tous les groupes qui s’installent dans la durée, qu’ils soient rock, pop, électro ou autres. Renouveler son genre est très compliqué et seule une infime minorité y parvient (mais là, comme ça, je ne vois pas grand monde à citer, à l’exception peut-être de Radiohead). Toujours est-il que ce Stupor Machine m’avait fait un bel effet et que remonter dans le passé s’est effectué avec plus ou moins de coups de coeur :). Patrick

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