[ LP ] BRIEG GUERVENO, Vel ma vin

Nouvel album de Brieg Guerveno, Vel ma vin (disponible chez Klonosphere).

Il y des albums, comme Vel ma vin de Brieg Guerveno, qui proposent un voyage sensitif rare et dense, d’une cohérence sans failles, et aux paysages imaginaires aux contours subtilement définis. Plus que de musique, nous pouvons presque parler d’âme.

Vel ma vin.

L’aube apparaît. Le soleil se lève doucement, sur un paysage vallonné de campagne. Il y a même un petit bois là-bas. Il fait froid, et le sol renvoie un peu de chaleur vers le ciel. Les rayons naissants du jour levant font ressortir un brouillard matinal qui se dissipera au premier coup de vent, au premier souffle de la voix de Brieg Guerveno. Chaude, recelant une puissance non dite, elle est celle d’un conteur. Et les histoires qu’il conte, même si nous ne connaissons pas son langage, sont de celles qui font naître des images d’elfe, de sorcières et de chevaliers.

Elle n’évoque pas le moyen-âge, soyez rassurés. Elle est moderne, ce que ne vient pas contredire des compositions soignées. Celles-ci sont un efficace mélange de douceur et d’électricité. Cette dernière est sous-jacente, en arrière-plan, comme si un vent furieux rôdait non loin de nous mais que le chant envoûtant de Brieg Guerveno maintenait à distance, comme pour nous protéger de la noirceur environnante.

Des images.

Bien que leurs univers artistiques respectifs soient relativement éloignés, nous sentons des similitudes entre la musique de Brieg Guerveno, Robin Foster (par exemple) et Sigur Ros (à plus forte raison). Nous sentons des racines profondément plantées dans l’histoire d’un pays, d’une culture qu’il faut à la fois préserver et perpétuer. Comme les Islandais de Sigur Ros, Brieg Guerveno fait le choix, osé, de chanter « local ». C’est-à-dire qu’il chante ici en Breton. Pour ne pas vendre son âme au diable. Nous pourrions croire qu’il se tire une balle dans le pied en optant pour cette langue, mais comme Sigur Ros, son message n’est pas que mots, il est aussi attitude, évocation par la musique de sentiments qui ne s’estompent pas au fil des minutes.

Cet album folk rock au tapis de cordes, soyeux, repose sur des tempos plutôt lents, favorisant la contemplation, parfois introspective, réveille, sans y paraître, et ce même si nous les ignorons, nos origines. Mais dans le sens universel de la chose. Car d’où que nous venions, Vel ma vin provoque une bouffée émotionnelle difficile à contenir. Nous y voyons peut-être de vertes campagnes, un massif montagneux, une région désertique s’étendant à perte de vue, un bord de côte, peu importe car les images suscitées sont celles que renferment notre cœur et de notre histoire.

Trop court.

Seul bémol de cet album, il ne possède que trop peu de titres (8). Cette brièveté n’est pourtant pas « mal », car elle permet, par sa concision, de rendre le voyage encore plus beau, plus intense. Jamais sa durée n’altère en effet le plaisir ressenti, et ce sentiment de se trouver là avec un album dont la lumière croît au fil des minutes (et au fil des écoutes successives). Nous ajoutons également que l’artwork de Vel ma vin lui rend hommage, par sa sobriété et ce noir et blanc lui aussi évocateur d’une certaine douceur.

L’aube a désormais laissé place au jour, les derniers filaments cotonneux du brouillard se sont détachés des branches des chênes centenaires. Son souvenir lui aussi disparaîtra, mais nous savons qu’il réapparaîtra le lendemain. Et la musique de Vel ma vin nous accompagnera, à coup sûr, pendant de longs mois de notre vie.

LE titre de Vel ma vin

Comme nous aimons bien les morceaux un peu tendus, An treizh suscite notre attention. Les cordes, bien présentent sur ce titre, notamment le violoncelle, lui donne ce côté un peu nerveux que nous aimons temps. Il contraste de belle façon la ligne de chant plus aérienne de Brieg Guerveno, l’ancrant au plus profond du sol, au lieu de la laisser s’envoler dans les cieux, sans retour possible. Le reste de l’album joue également avec ce contraste aérien/terrien, sans que jamais nous ne nous trouvions embarqués dans l’un ou dans l’autre.

Avec ses arrangements de claviers, An treizh mélange tradition et modernité dans un équilibre parfait, sans aucune bascule intempestive dans l’un ou dans l’autre. Cet équilibre est une clé de voûte de Vel ma vin qui, tout en ayant du sens, sait rester au diapason de l’air du temps. Nous hésitions à nommer Petra zo bet, morceau central de l’album, laissant plus de place à l’électricité des guitares, tout aussi intense que An treizh. Mais pour une fois, le côté acoustique l’emporte !

brieg guerveno vel ma vinSite officiel Brieg Guerveno

 

On pense à Deleyaman

Leave a comment