[ALBUM] AUTÓMATA // Post rock sentimental. Ou pas.

Autómata, premier album éponyme (déjà disponible).

Ils sont malins. Ben oui. On se dit qu’on est un peu charrette, qu’on n’a pas vraiment le temps d’écouter un album parce que la vie va trop vite, qu’on oublie bien trop souvent de la savourer et ce genre de pensées fulgurantes qui nous font prendre abruptement conscience que de vie, nous n’en avons qu’une, et qu’il faut prendre le temps de la vivre pleinement. Mais bon, nous nous égarons. Ils sont malins, Autómata, parce qu’il nous livre une EP 5 titres, qu’on peut savourer sur le pouce comme ça, vite fait, et que ça va dans le sens de cette vie qui fonce à toute vitesse, cheveux dans le vent.

Ouais, sauf que l’objet dure pas loin de 35 minutes et que, dès qu’une oreille s’est faite choper par la première sonorité de guitare, impossible d’en réchapper. Alors on se pose, vraiment, casque sur les oreilles, et on se laisse embarquer dans la musique d’Autómata. Et on prend le temps, accessoirement.

Post rock.

Tout commence par le bruit de la mer. Plus vrai que nature. Nous nous attendons à un album contemplatif, yeux perdus dans les embruns, vent fouettant notre visage qui n’en réclamait pas tant. Pousser le physique dans ces derniers retranchements, par le biais d’un imaginaire qui sort de sa chrysalide, avant de développer une musique qui serpente entre nos vertèbres et nos neurones, comme ça, sans que nous n’y trouvions rien à redire. Nous partons donc pour Tanger. La mer, le sable, la chaleur. Un bourdon (basse?), un clavier, un batterie lente, une guitare. Déjà la chair de poule envahit l’espace.

Autómata plante le décor, rock instrumental, doux mais grave, lumineux et sombre à la fois, à la production enveloppante. On pense, tout de suite, à Mogwai, que voulez-vous ? Des fiers Écossais, les fiers Français ont chopé le truc, mais le tournent à leur façon, avec une sensibilité qui ne ment pas. Forcément, quand un groupe œuvre dans l’instrumental, il faut que la musique dise les mots, qu’ils nous sautent au visage, à l’âme, au cœur. Et c’est ce qui se produit d’entrée de jeu, et ne nous quitte qu’à la fin d’Automate, qui referme l’album.

Il y a des guitares électriques, tension, et des guitares acoustiques, relâchement. Il y a une basse aussi, afflux sanguin, rendu métronomique par une batterie parfois pop, parfois plus lourde, presque metal. Le jeu de clavier n’a rien à envier, propose des nappes élégiaques ou des parties d’une sincérité démoniaque quand ils devient piano.

BANDCAMP du groupe

Douleur, joie, et autres sensations.

En 5 titres, Autómata pose les émotions à plat. Sentiment d’exaltation, d’innocence, de paix, de tourments intérieurs, de colère, de béatitude, de peur, d’envie, de combats qui semblent perdus d’avance mais qui ne le sont pas, de lumière, et paradoxalement de ténèbres, il nous est simplement impossible de rester passif à l’écoute des titres. L’engagement du corps se fait, qu’il soit conscient ou inconscient, cette musique parlant directement à ce qui nous définit en tant qu’Homme. Impossible de rester impassible, on doit bouger, évacuer cette énergie, transmise par le groupe, qui nous électrise et nous captive.

On sent, par-delà ces instrumentaux, le parti-pris, toujours couillu, de ne rien dire et de laisser la musique s’exprimer pleinement. Alors on se laisse envahir, quitte à ne plus rien maîtriser de notre espace vital. En même temps, le groupe ne nous demande rien, il investit chaque recoin laissé vacant, libre, pour s’y réfugier, guider nos ressentis sur le chemin d’une expression muette. Un peu comme un rêve. On se laisse faire parce que c’est bon. Parce que cela nous donne l’impression de ne pas être encore totalement mort.

Faire ressurgir ce qui est caché.

Cet album permet de faire remonter à la surface ce que la pudeur nous empêche d’exprimer. Ce que la colère aussi. Il tombe à point nommé, cet Autómata, alors que, comme des automates, nous nous sommes formatés au règne d’un virus dont on nous dit tout et son contraire. Nous nous électrisons alors avec cet album, mettons les doigts dans la prise, comme un défibrillateur qui ferait battre à nouveau notre cœur, nous dire de ne pas abandonner, de ne rien laisser passer, de continuer à nous aimer, à aimer ce monde qui est le nôtre.

Ne pas s’avilir, ne pas renoncer, combattre les certitudes toutes faites, prendre conscience de ce qui nous entoure, de l’autre, de la planète. C’est dingue tout ce qu’un disque instrumental peut dire, si tant est que nous sachions véritablement ouvrir nos oreilles et notre cœur. Ne pas rester seul, ne pas rester aveugle/sourd/muet, exprimer ses émotions, de façon viscérale, brute, poétique, simple, concrète. La musique, ici, ne ment pas, elle guide nos pas vers une forme de conscience d’éveil. Et Autómata nous invite à ne pas nous laisser ensevelir sous les sables mouvants du qu’en dira-t-on.

Peut-être en faisons nous trop dans cette chronique ? Ou peut-être pas tant que ça, finalement ? Toujours est-il qu’Autómata réveille ce que le post rock a de meilleur, ce trop-plein d’émotion que nous n’arrivons plus à contenir, sans nous dire quoi penser, quand le penser, ni pourquoi le penser. La force des compositions de ce groupe nous terrasse et nous subjugue, nous emmène dans un monde à part où nous nous sentons libres, totalement, de dire et écrire ce qui nous passe par la tête, quitte à faire « nos fans ». Plus que jamais, la musique apparaît vitale, et ce n’est pas nous qui allons nous en plaindre. Bref, ils sont malins, Autómata.

Autómata

 

On pense à A swarm of the sun

Nous retrouver sur FB, instagram, twitter

soutenir litzic

 

Ajoutez un commentaire