[ROMAN] ANAÏS VANEL, Tout quitter, tout recommencer ?
Premier roman d’Anaïs Vanel, Tout quitter, aux Éditions Flammarion.
Ne pas se fier à un titre de livre, surtout quand il est si court, et donc libre de toute forme d’interprétation. Ne pas se fier à une couverture qui pourrait faire penser à un feel good book. Ce premier roman, même s’il possède les atours d’un livre léger, est beaucoup plus profond que cela. Tout quitter, d’Anaïs Vanel, est une quête de soi, une histoire de choix, une question sur la vie que l’on saisit avant qu’elle ne nous échappe totalement.
La forme.
Tout quitter se décompose en quatre parties, automne, hiver, printemps, été. Ces parties sont elles-même décomposées comme si chaque page était issue d’un journal, intime, où la narratrice aurait exposé ses pensées, ses constats, ses observations. Sur le monde, sur elle-même, sur son passé, son présent et sur le cap à suivre pour être en osmose avec elle-même dans le futur.
Ce journal, la narratrice semble l’avoir commencé au moment où elle est arrivée en bord de mer, de la Sud pour être précis, après avoir rempli son Berlingot et quitté Paris. Elle venait de tout plaquer, son job, la ville ou elle vivait depuis de nombreuses années, comme ça, parce qu’elle en ressentait le besoin, parce que ça lui devenait vital.
Le fond.
Il est difficile de croire que Tout quitter n’est pas, en grande partie, le reflet de la vie de son autrice. Du moins sur certains points (qui sont facilement vérifiables, ne serait-ce que sur la quatrième de couverture). En effet, Anaïs Vanel a quitté son poste d’éditrice (chez Flammarion) pour se lancer dans l’écriture, suite à son départ de Paris pour la Sud. Pourtant, nous sommes bien dans un roman, même s’il est fortement teinté d’autobiographie.
L’histoire est donc celle de la narratrice, qui quitte Paris, son job, ses amis, pour s’installer à la Sud. Une femme en quête d’elle-même, de son identité profonde, et non une femme qui subit, en quelque sorte sa vie. Adoptée, elle est en recherche de ses fondations, et choisie la Sud, un endroit où elle avait passé des vacances, étant enfant. Elle s’y installe puis commence à surfer. Ses pensées prennent dès lors vie dans ce journal intime, pensées à la fois très terre à terre, parfois très poétiques, souvent existentialistes.
Une vague.
Comme une vague, avec ses crêtes et ses creux, nous suivons cette vie en plein chambardement et nous nous prêtons au jeu de l’identification avec ce « personnage » touchant. Ses interrogations nous parlent, bien que n’ayant jamais été adoptés nous-même, surtout car nous nous interrogeons sans cesse sur qui nous sommes et sur ce pour quoi nous sommes « véritablement » faits.
La narratrice, et Anaïs Vanel, trouvent certaines réponses, du genre de celles que nous avons tout au fond de nous mais que, une fois devenus adultes, nous avons enfoui sous une couche de prétextes ne nous permettant plus d’y voir les aboutissements. C’est très bien dit page 42 : « Chaque enfant a une vision claire , quasiment prophétique, de l’existence qu’il entend mener. Au fil des années, nous l’oublions. Un jour, nous la rangeons pour de bon sur l’étagère des souvenirs heureux. »
Ainsi, dans cette fuite vers l’avant, combien même l’héroïne en ignorait les raisons profondes, le jour se fait sur sa perception du monde et de sa propre existence. Ce livre ne passe pas à côté de son sujet, ne nous amène pas dans un univers édulcoré dans lequel tout va bien dans le meilleur des mondes, mais pas non plus dans un environnement pleurnichard et replié sur lui-même. Non, ce livre, c’est un peu celui d’une révélation, qu’une vie n’est jamais finie avant que la mort ne s’invite, et que nous pouvons tous espérer y être heureux, en regardant bien au fond de nous… Ou dans l’eau limpide de La Sud.
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