Michael Walsh, Les Contrées de L’Elphyne (Humanoïdes Associés)

les contrées de l'elphyne mickael walshOuvrez bien vos oreilles d’Elf Fines !

Beth, la petite sœur de Lynn et Ben a été enlevée. Les deux adolescents sont affolés. Les adultes décident d’explorer la forêt en laissant Ben et Lynn aux soins de leur grand-mère. Comme vous vous en doutez, ils s’élancent dans la forêt pour retrouver leur sœur. Un être lumineux leur apprend que Beth a été kidnappée par une ombre. La créature de lumière les entraîne dans Les Contrées de L’Elphyne, un autre monde, qui donne vie à l’imagination de tous les êtres qui y séjournent, pour le meilleur ou le pire… En effet, l’ombre gagne du terrain dans les Contrées. La mission de Ben, Lynn et de l’ours en peluche de Beth est d’en trouver la source pour sauver ce monde féerique et le leur par la même occasion.

Chasser ses zones d’ombres

Michael Walsh, auteur de comics canadien, nous entraîne dans une aventure fantasmagorique (j’adore ce mot depuis ma rencontre avec Marianne Desroziers) : les couleurs sont douces, les dessins sont courbes, comme si nous nagions dans du coton.

Pourtant, le sujet est plus traumatique qu’il n’y paraît. L’auteur nous raconte à travers ses illustrations d’une maîtrise admirable, un événement qui aurait pu détruire son enfance. Sa sœur a été enlevée aussi. Dans le monde réel cette fois.

Certes, tout s’est bien terminé, mais l’artiste a été tellement marqué par ce manque, même temporaire, qu’il a failli se noyer dans ses nuits de terreur. Un autre manque plus définitif a fait écho à l’enlèvement : la disparition de sa grand-mère.

L’album qui s’est glissé entre mes mains témoigne de ce double manque. Il est d’autant plus précieux que la grand-mère de Michael Walsh est décédée avant la fin de la création de ce projet. Cette dernière information fait écho à beaucoup d’autres projets de créatives prunelles qui n’ont pu achever leurs ouvrages hommages à temps.

Ça fait mal et ça fait rien

Bien sûr que la perte d’un être cher est une douleur difficile à appréhender, peu importe l’âge des vivants qui l’expérimentent.

Se laisser abattre et s’effondrer pour de bon peut être la seule voie que ceux qui restent prennent.

Plus largement, un proche touché par la maladie, un accident de la route, une agression, des dettes de jeu, l’alcoolisme, la drogue, que sais-je encore, peut s’avérer compliqué à gérer pour ses piliers : celles et ceux qui sont essentiels à son équilibre.

Michael Walsh réussit ce qu’aucun « chevalier en armure » n’a jamais réussi dans les chansons de geste ou les ouvrages de fantasy : il terrasse les crabes qui empoisonnent nos organes, les harpies qui dévorent nos cerveaux et autres monstres qui nous assaillent dans notre existence.

Il les détruit en nous ouvrant la porte de son monde traumatique. Il habille ce monde de teintes tendres, mais entre les lignes nous lisons sa réelle peur.

Il ne tue pas ses monstres et nous invite ainsi à faire de même. Oui, il y a des ténèbres dans sa vie comme dans la nôtre.

Les ténèbres existent.

Tant que nous ne les acceptons pas, elles nous gouvernent. Un peu cliché dit comme ça, mais j’adoooore les clichés !

Pour qu’une ombre ne laisse pas de traces durables en vous, accepter son existence et redonner du sens à votre lumière, pour que d’autres puissent conserver leur lueur intacte, est la voie que nous ouvre l’auteur.

Laissez-vous guider en franchissant le seuil de son monde.

Les Contrées de L’Elphyne de Michael Walsh chez Les Humanoïdes Associés, 128 pages couleur, mars 2022

Article par dArlet

dArlet est un auteur de romans, artiste graphique, fan de BD et on espère très bientôt auteur de bd.  

 

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