C’est sorti en 2022. Rattrapage 1

On remet les pendules à l’heure avec certaines productions jusque là non chroniquées mais qui nous ont tout de même tapé au tympan en 2022. On lance le rattrapage 1 avec Jorg Feudenfjord.

jorg feudenfjord rattrapage 1Son premier album Twist n’fjord ne manque en effet ni de charme, ni de personnalité. Dès son entame, avec le titre « aquatique » Lack Of Groove (les effets sur les guitares nous donnent en effet un sentiment liquide, que l’on retrouve tout au long de ce long format), on tombe sous la coupe machiavélique de ce pas du tout scandinave artiste. En effet, français, Jorg Feudenfjord brouille les pistes et nous offre un album absolument incomparable. Le gaillard œuvre dans une forme d’art pop, nous évoquant parfois un peu Mush, parfois aussi, par le côté spontané et définitif de ses chansons, au chantre de la pop psychédélique Syd Barrett.

Avec une voix élastique, des mélodies addictives et, aussi, un peu magiques (on ne les prend jamais en défaut malgré des instrumentations mouvant au gré de divers courants, glacés des fjords ou chauds des mers tropicales), Jorg Feudenfjord nous offre un disque qui nous met en joie. Littéralement, nous sourions sous l’effet de ce détachement, de ce (presque) second degré qui en ressort, un peu comme si ce musicien fantasque ne se prenait absolument pas au sérieux.

Pour autant, ces compositions le sont toutes, sérieuses. Difficile de ne pas succomber à leur pouvoir de séduction, dû sans aucun doute à ce groove délicat, jamais surjoué, mais aussi par cette aura ensoleillée et réconfortante, ainsi que par ces multitudes d’idées aussi géniales qu’abouties. Ainsi, on se laisse bercer par les facéties de ce disque qui, même si une oreille peu exercée aurait tendance à le trouver approximatif sur pas mal de points, s’avère d’une redoutable précision (et là, on touche au bricolage de génie).

Les arrangements, le chant, rien n’est laissé au hasard et nous offre un disque aussi chaud qu’un thé bouillant servi sur les rives enneigées d’un quelconque pays scandinave et aussi frais qu’un thé glacé sur les rives ensoleillées d’une plage des bermudes.

A découvrir sans tarder ! Le disque est disponible depuis le 25 novembre sur le label Les Inveftigations Phoniques

#pop #poppsychédélique #artpop

guadal tejaz rattrapage 1GUADAL TEJAZ, Noche triste

On quitte l’univers fjordien pour celui des Guadal Tejaz, groupe rennais qui pratique un rock teinté d’essence post punk. Certes, rien de bien nouveau sous le soleil breton, si ce n’est que, bien qu’il ne révolutionne en rien le genre, le groupe parvient à pondre un album d’une très forte cohérence et unité. Porté par un chant habité, doté d’un superbe trémolo nous évoquant parfois ceux présents dans le rock, heavy ou pas, mais souvent psychédélique, des années 60-70. Ajoutez à cela des compositions solides comme le granit et vous obtenez un combo n’ayant aucune peine à vous rallier à sa cause.

Les rythmiques sont imparables, dégagent un groove vénéneux, lequel, augmentées par des guitares inspirées, et un chant absolument magistral, rétame toute la concurrence (mais avec grâce et toujours à propos, c’est-à-dire que le but n’est pas là, rétamer la concurrence, mais c’est ce qui arrive par la force des choses). Pas besoin de grands moyens techniques (la production est sobre mais très efficace) ou de grandiloquence pour parler au plus juste de ce que doit être ce genre musical énervé mais réfléchi. Ainsi, en ajoutant parfois une pointe de synthé, en haussant ou en baissant ostensiblement le tempo, au gré des envies du groupe, Guadal Tejaz évite une linéarité qui aurait tout pour déplaire.

La tracklist, maligne comme tout, déjoue le piège de la répétition pour nous offrir un album haut de gamme même si potentiellement absorbable par la masse des disques dans cette même veine. Tant de groupe se jette corps et âme dans ce genre musical qu’il est dur de trier les bons de ce qui le sont moins et, c’est un fait, il faut prendre un peu de temps pour que la magie de Noche Triste opère à 100% et de façon pérenne. Les aficionados du titre parfait lançant un album, et qui foutent le camp dès le deuxième morceau, pourraient fort injustement passer à côté de Noche Triste qui développe ses toxines vénéneuses par petites touches bien senties et régulières. On conseille à ceux qui se font un avis en 30 secondes de prendre deux vraies minutes pour s’immerger totalement dans l’univers Tejazien. Elles seront vite dédommagées par un plaisir allant croissant et durable dans le temps.

Patrick Béguinel

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