HERMAN DUNE, COURCHEVAL, VANESSA PHILIPPE

Trois albums, trois saveurs.

Ces albums nous ouvrent des horizons divers, folk avec Herman Dune, pop avec Courcheval, et chanson française avec Vanessa Philippe. Différents mais empreints de cette même originalité qui construit des univers à part, The Portable, Courcheval et Soudain les oiseaux nous éloignent de ce que l’on a l’habitude d’entendre et explore des chemins détournés pour montrer ce que l’âme de leurs géniteurs porte en leur sein.

Herman Dune The PortableHerman Dune

S’il est un homme dont l’univers nous touche, c’est bien lui ! Avec The portable, son nouvel album, nous retrouvons tout ce qui fait que sa musique demeure aussi attachante : des mélodies qui paraissent simples mais qui ne le sont pas tant que ça, une voix pleine de vie, qui touche par son caractère spontané, par ses sortes d’approximations qui laissent transparaître l’émotion, par la simplicité des orchestrations aussi, très acoustiques, folk.

Une fois encore, tout paraît très simple, mais les paroles, et ces compositions, sont tout sauf bâclées. Au contraire, on y sent une exigence, celle du jet premier qui transporte toutes ses vérités directement à nos oreilles. La sobriété instrumentale et celle de la production, épurée, vont également dans le sens d’une pudeur toujours renouvelée.

Jamais Herman Dune ne se la raconte, ne se pose en un prédicateur qui à lui seul détiendrait une vérité. En revanche, il nous raconte ses histoires, ses ressentis, d’une façon totalement nue, pure, touchante aussi. L’émotion est toujours palpable, mais aussi une certaine joie qui transparaît à travers quelques choeurs, pourquoi pas.

Des petites entourloupes surviennent sur certains morceaux, cassant ce que nous pensions être un morceau téléphoné et rabâché mille fois. Ces petits changements de rythmique, ou ces facéties vocales, apportent un caractère unique à ces chansons paraissant survenir d’un autre temps.

Inclassable et à part dans un paysage folk qui s’engonce parfois dans des esthétiques douteuses, Herman Dune préfère la vérité d’une guitare en bois et d’un enregistrement maison plutôt que de pervertir son âme avec quelques moyens technologiques frauduleux. Ainsi, son âme est préservée, il nous la livre sur une belle galette qui, forcément, ravive l’âme folk dans sa globalité.

CourchevalCOURCHEVAL

Nous avions chroniqué il y a quelques mois le premier EP de Courcheval. Cet artiste nous revient avec son premier long format, sobrement nommé Courcheval. Certes, ce n’est pas très original, mais le disque, lui, l’est. Passons rapidement sur les titres qui sont communs au deux ouvrages pour nous arrêter sur ceux qui sont inédits.

Dans ceux-ci, nous retrouvons le son Courcheval, un mélange de folk, de bidouilles en tout genre, pas forcément toutes électroniques, un aspect parfois funky, parfois très chanson française, des lignes de chant efficace et un chant en français.

Les textes sont tous d’une grande importance, sont l’exploration intime, qu’on pense aussi un peu fantasmée, de la psyché de cet homme qui se cherche et se trouve, s’affirme. Si les titres laissent presque à penser que l’ego trip est de rigueur, on échappe de ce carcan grâce à une approche littéraire pleine de sens et de sensibilité.

Les mélodies s’incrustent très vite dans notre tête, reviennent comme des rengaines obsessionnelles, un peu comme peuvent l’être les questions existentielles qui semblent ici de rigueur. Pourtant, jamais musique et paroles ne sombrent dans un contexte trop cérébral et, à la manière d’un Alors on danse de Stromae, restent étrangement dansante quand bien même les thèmes abordés sont ultra intimes.

Cette balance entre fête et introspection donne un mélange étonnant, euphorisant, auquel on parvient sans peine à s’identifier, tout ou partie. La surprise du premier EP n’existe plus, certes, mais la personnalité de l’artiste s’impose comme une voix à part de l’univers pop français, originale, esthète mais aussi divertissante derrière le spectre de cette volonté d’aller au fond des choses.

Vanessa Philippe Soudain les oiseauxVANESSA PHILIPPE

La tête dans un aquarium et un titre d’album, Soudain les oiseaux, en contradiction. Musicalement, il y a contradiction, ou plus exactement une contraction, un point de fusion entre pop, chanson française et rock. Vanessa Philippe détourne les codes, les façonne à sa manière, en tire le meilleur pour en expurger le moins bon.

Son univers est donc surprenant, navigue entre piano acoustique et guitare électrique, entre rythmique classique et ajouts électroniques discrètes, le tout en chantant en français des chansons comptines intimes et universelles.

Rien n’est laissé au hasard et l’ensemble s’avère souvent étonnant. On pense parfois à Lio, pour ce côté un peu décalé, par certaines inflexions vocales, et un timbre de voix également, approchantes. Est-ce un mal ? Non, car nous ne sentons pas forcément une connivence flagrante, et les textes permettent de les distinguer avec aisance.

Ici, les textes sont écrits à la perfection, délivrent à la fois un petit parfum de nostalgie joyeuse (même s’ils ne masquent pas, parfois, un peu de noirceur du type dépression) et d’emprise sur le présent. Réalistes, mais dégageant parfois une pointe de léger surréalisme, ils invitent à la réflexion, ouvre le champ des possibles des métaphores et imposent donc une lecture très personnelle de l’intime de la musicienne.

La présence de l’oiseau, des airs, est très présente, comme si Vanessa Philippe voulait exprimer son besoin de prendre de la distance, de s’évader du quotidien en rejoignant un monde plus léger, débarrassé de certaines contraintes pesantes. En 12 vignettes/saynètes, l’artiste nous invite à lâcher prise, à chercher un ailleurs réconfortant, quelque part au milieu des nuages (quels qu’ils soient, finalement, ces nuages, bref qu’ils nous soient propres).

Avec poésie, avec parfois un léger spleen, Vanessa Philippe déroule une musique pleine de lumière et de grâce, à laquelle il fait bon se rattraper quand on perd pied.

Patrick Béguinel

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