Dorthia – Death Folk Country

Dorthia21 Avril 2023 Relapse Records.

Le moment est venu de vous parler du disque de Dorthia ( alias Cottrell) «Death Folk Country» dont la musique laisse une étrange sensation ambivalente, une onde glacial et brûlante à la fois. Death Folk Country exprime une sensibilité et une mélancolie bardées d’une lucidité évidente. «Death Is The Punishment For Love» répond à «Death Is Reward For Love» en une sorte d’écho, une boucle qui introduit et conclut l’album. A l’évidence, aucune référence à la musique country, mais plutôt un blues lugubre, hanté.

Un ailleurs qui se joint à vous.

Faisons transition si vous le permettez : l’instant se prête aux considérations philosophiques sur la folie de notre temps. Préoccupation constante, en ce monde de dilution, espérant un remède au désespoir, Dorthia induit un sentiment de déception, amours blessés, existences dévastées. Ce blues provient des tréfonds de la terre, du centre même du siège des émotions. Saint Augustin décrivait justement cette dichotomie « le corps n’est que l’âme retournée et rendue visible pour les sens ». «Black Canyon» illustre cette solitude idéale pour s’isoler, loin des quais des habitudes, la nécessité de l’ombre. On a l’impression d’écouter en secret, comme un plaisir coupable et sans trop éveiller les soupçons le disque suprême.
Les titres s’égrènent «Effigy At The Gate Of Ur» ou «Midninght Boy» sont des balades fantomatiques, presque irréelles et pourtant bien ancrées dans le factuel.

Dans son précédent album solo, il y avait déjà cette tristesse fascinante où folk et blues des marais ne faisaient plus qu’un. Ce qui marque l’esprit, c’est la voix de Dorthia, grave, inhabituelle. De son groupe Windhand, elle y extrait ici toute la véracité dépouillée d’artifices. Affronter le monde de cette manière aussi désarmante, n’est pas un aveu de faiblesse, bien au contraire. Nous avons besoin de sincérité, le chant de Dorthia s’abreuve de contrées lointaines, des remous qui tordent l’âme, comme les lianes d’une jungle où la moiteur est palpable, pareille à de la résine suintant de fleurs capiteuses, les parties de guitares sont embaumées de scintillements. Chaque titre vient effleurer la surface de la peau, puis lentement pénètre l’épiderme et diffuse dans le corps, une sorte de poison lysergique. On voyage dans les marécages, on y découvre un no man’s land, où le temps s’est figé. Dorthia signe une oeuvre magistrale qui s’écoute dans son intégralité.

Dorthia Cottrell
crédit photo : Richard Howard

Franck irle

Elevé dès mon enfance aux vinyles, initié au piano et à la guitare, première révélation avec les Beatles à l’âge de 8 ans issue de la discographie de ma mère. Autre révélation avec Jack Kerouac, et la beat generation durant mon adolescence. Je me suis décidé à écrire des chroniques sur un blog dédié à la musique Francophone souterraine ( Jean Le Fennec, Wertheimer, Alain Kan…) et depuis ? Je dévore les disques au quotidien, participe avec WhatTheFest en tant que bénévole pour des concerts sur Montpellier ( Lingua Ignota, Anna Von Hausswolff). Ci-joint une photo polaroid un peu floue ! Je compose aussi et travaille sur un projet solo, Zero Circle : https://zerocircle.bandcamp.com/

Lire une autre chronique de Franck ici

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