DECASIA, An endless feasts for hyenas (dispo chez Heavy Psych-Sound)

decasia an endless feasts for hyenasUn debut album explosif.

Si An endless feast for hyenas est le premier album de Decasia, le trio originaire de Nantes, mais installé sur Paris, n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il a déjà sorti deux Eps, Decasia en 2014 et The Lord is gone en 2017. Si le groupe sait prendre le temps entre chaque disque, grand bien lui en prend car ce premier album est une parfaite réussite.

Le nom du label oriente aisément sur le genre musical qu’emprunte le groupe. En effet, Decasia évolue dans un rock psychédélique assez lourd, stoner, aux belles introspections instrumentales. Si le genre fait des émules, de Moundrag à Dirty sound magnet, Decasia tire son épingle du jeu par une personnalité d’apparence plus sérieuse, par des compositions progressives et par un son inimitable.

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Chevauchées électriques.

La musique de Decasia prend le temps de poser des bases solides. Dès le premier titre, Llion, on sait à quoi s’attendre : disto et fuzz de guitare, paire rythmique binaire, bien appuyée sur la batterie, plus mélodique sur la basse, même si cette dernière impose un rythme soutenu, voix expressive, tout est réuni pour nous propulser quelque part au tout début des seventies. On pense évidemment aux indéboulonnables Steppenwolf, Deep purple et Led Zeppelin, bien que la voix ne soit pas ici aussi aiguë que celle de Robert Plant.

Niveau implication en revanche, nous retrouvons le fiel du chanteur des Led Zep. Absolument rien à y redire, c’est du bon, très bon niveau. Légèrement rehaussée d’une pointe d’ écho, d’un soupçon de disto (très très légère), elle impose une classe monstrueuse, totalement en prise avec celles de l’époque, sans surenchérir et basculer dans l’excès. Cette sobriété est un atout, le groupe ne singe personne, il s’exprime juste comme il le sent. Et comme il le sent bien, sa musique s’en ressent.

Les mélodies, autant vocales qu’instrumentales sont puissantes, souvent burnées, mais surtout inspirées. Effet immédiat : l’univers du groupe nous paraît tout de suite familier. Cette familiarité est en revanche à double tranchant car nous pourrions presque penser que le groupe manque d’originalité. Fort heureusement, ce n’est pas le cas, car il sait nous surprendre. Un titre « interlude » comme Soft was the night par exemple (qui conclut en douceur le titre précédant Override), montre que Decasia est capable de beaucoup de tact et de finesse.

Decasia

crédit photo Angela Dufin

Born to be wild.

L’appel de la route nous saisit rapidement à l’écoute d’An endless feasts for hyenas. Les titres, relativement longs (rarement sous les 5 minutes), imposent leur rythme, leurs images. Et pas de meilleur moyen que de monter sur sa moto, ou dans l’habitacle de son roadster, de mettre le moteur en route et de bouffer du bitume sur une bonne centaine de miles. La musique envahit le cockpit, bande son d’un voyage qui échappe aux règles terrestres puisqu’il nous permet, cet album, de faire le vide, d’imposer un calme intérieur, comme si Decasia exprimait pour nous tout ce qui traverse, en étoile filante, notre crâne.

Le ton, s’il peut paraître légèrement véhément, n’est pas colérique. Il n’est pas plus nostalgique, encore moins mélancolique. Il est simplement un cri de liberté, une expression de vie, une évocation solaire d’un état d’être, pour et par la musique.

En ce sens, An endless feasts for hyenas n’impose rien, même s’il s’impose à nous de façon directe, légèrement vaporeuse comme peuvent l’être les rêves inaccessibles. Pour autant, cet album ne dégage pas un onirisme psychédélique un peu baba cool. Au contraire, il se pose dans une réalité tangible, concrète, au ras du bitume, même s’il parvient à nous élever vers des cimes d’ordinaires inaccessibles, même s’il le fait toujours les pieds fortement ancrés au sol.

Efficace et carré.

An endless feasts for hyenas s’avère donc un premier album particulièrement réussit. Decasia parvient sans peine à nous offrir une porte de sortie à un quotidien plombé par mille obligations, sans être totalement déconnecté du monde réel. Concret et carré, il n’en propose pas moins une porte de sortie, de celle qu’on dit de la perception.

Ainsi, c’est quasiment une obligation que de se pencher sur ce disque qui crée un pont entre les belles et relativement insouciantes années 70 et notre époque bien moins légère. Cet album nous offre malgré tout une occasion d’espérer qu’on saura faire le point, se saisir à nouveau d’une part de naïveté salvatrice. Mais ça, c’est à chacun d’entre nous d’appréhender la chose à sa manière, mais toujours dans le but de profiter de ce qui est bon.

DECASIA

crédit photo Mariette Briand

LE titre de l’album.

Nous l’avons cité, il s’agit du morceau Override. Après une belle introduction d’un peu plus d’une minute, rythmiquement progressive, donnant la tonalité du titre, on sent que le trio se fait plaisir. Voix doublée sur le refrain, effets stoner renforcés au même moment, Override met l’accent sur la capacité de Decasia à mêler les genres (psych et stoner) et à imposer sa force mélodique. Les guitares s’approchent d’une sorte de hard rock/heavy metal (pour tout dire on pense aux solos de Slash).

Et puis survient un pont, aérien, nuageux comme un ciel d’orage sur le point de crever, et quand telle est la chose, l’électricité se déverse dans nos tympans, sur un rythme enlevé, pour notre plus grand plaisir. Suivi de très près par l’interlude Soft was the night qui apporte une seconde touche de douceur, le titre s’avère implacable. Et on adore !

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