[EP] YUKON DELTA NATIONAL WILDLIFE REFUGE, Blitz sessions
Blitz sessions, EP de Yukon delta national wildlife refuge (déjà disponible, autoproduction)
Nous pensions le post rock déjà dévoilé au monde par ces plus beaux représentants, à savoir d’un côté les Canadiens de Godspeedyou ! Black emperor, de l’autre les Écossais de Mogwai. Pourtant à la liste s’ajoute désormais les Norvégiens de Yukon delta national wildlife refuge (que nous nommerons par l’acronyme YDNWR). Leur nouvel EP, Blitz sessions est dans la plus pure tradition du style et répand autour de lui son onde émotionnelle dévastatrice.
Ambiance instrumentale forte.
Tous les ingrédients sont là pour produire une musique dans ce que le genre fait de mieux. Guitares, batterie, basse, claviers, petites touches électroniques et surtout un tact à peine croyable. Car pour ceux qui ignorent de quel bois est fait le post rock, nous dirons simplement ceci : c’est une musique qui fait ressentir, deviner l’intention d’un groupe, à travers de longues plages, le plus souvent tout instrumental. Ici, nous sommes en plein dans le mile, avec 4 titres dont le plus court atteint les 7’06, pour un total dépassant les 32 minutes.
Question instrumental, nous sommes servis. Une base faite de motifs répétitifs, répétés à l’envie, comme pour mieux se frayer un chemin dans notre cortex cérébral. Il peut s’agir de quelques notes ou d’une petite ritournelle « basique » qui installe le climat et sur laquelle, au fur et à mesure du décompte des secondes, s’ajoute, par touches légères ou par poignées, les autres instruments. Ceux-ci brodent autour de ses motifs une trame plus complexe, faite d’éclair d’électricité, de montées en tensions rythmique, ou au contraire produisant un break retentissant dans l’orage. Cette trame touche au coeur, à l’âme de qui écoute.
C’est quoi ce bruit ?
Le point fort de ce Blitz sessions (rappelons que Blitz signifie éclair) est que d’un point de départ souvent très épuré, le groupe parvient à créer une atmosphère qui s’avère empreinte d’un caractère presque pieux, ou du moins évoquant le recueillement, avant qu’une colère froide et plus ou moins soudaine le submerge, par vague de distorsions successives, de montées en puissance s’achevant parfois dans le chaos. La superposition des instruments, des déflagrations soniques, feront dire à certain « c’est quoi ce bruit ? ». Nous dirons simplement qu’il est l’expression nue d’un sentiment que nous situons entre l’abandon, la colère et l’incompréhension.
Et puis, il ne s’agit pas de bruit. Derrière l’impression de brouhaha indescriptible, il est aisé de déceler une structure à l’architecture claire. Elle a pour but de porter les sensations à leur paroxysme, d’atteindre une crête depuis laquelle observer, avec le recul nécessaire, l’état dans lequel se trouve notre psyché. Il va sans dire qu’elle est parfois endolorie, mais qu’elle cache néanmoins en son sein un espoir ténu représenté par les mélodies qui, même noyées sous un déluge de décibels, maintiennent le cap d’un morceau.
Simplicité viscérale.
YDNWR joue, comme ses prédécesseurs, la carte de la simplicité. Mais celle-ci est complexe. Simplicité par le thème initial du morceau. Complexité par l’entremêlement des arrangements, par la structure progressive des morceaux. Chaque détail porte ici son lot de conséquences, d’implications, c’est-à-dire qu’il réveille une zone sensible de notre être, trace la suite du sillon que suivra le morceau, nous propulse parfois sur une autre voix émotionnelle, ou alors nous fait plonger dans les entrailles de notre âme.
Le jeu des distorsions est des plus efficaces, exprime l’émotion contenue dans une mélodie presque romantique. Le coté épique des morceaux parle pour lui, et nous sommes libres d’y poser nos propres interprétations. Les nôtre s’orientent vers la force de la nature qui peut passer d’un état paisible et contemplatif à celui de tempête incontrôlable. Il peut aussi révéler le caractère amoureux d’un être, dont le coeur s’embraserait de joie ou de colère suite à une déceptions amoureuse. Tout dépend, finalement, du point de vue que nous décidons d’adopter.
Blitz Sessions permet au groupe de s’installer, avec tact et force, dans le paysage post rock que nous aimons tant. Nous n’avons aucun mal à citer les aînés de GYBE ou Mogwai car Yukon delta national wildlife refuge n’a, à vrai dire, pas grand-chose à leur prouver. Déjà un grand groupe !
On pense à Sing sinck sing