[ ALBUM ] NFL3, ABCDEFG HI ! Majorité solaire.
Nouvel album « anniversaire » de NFL3, ABCDEFG HI ! (Prohibited records)
Si les 18 ans marquent l’anniversaire de la majorité, c’est véritablement à 20 ans que nous passons de l’enfance à l’âge adulte. Bien sûr, nous gardons une part non quantifiable de l’adolescence, une fougue, une insouciance, mais celle-ci s’estompe souvent pour laisser place à une maîtrise plus sereine de nos émotions. Les groupes n’y font pas exception comme nous le prouve NFL3 et son nouvel opus ABCDEFG HI ! couronnant 20 années de carrière avec une grâce solaire.
Instrumental.
La musique du groupe impose sa force de façon originale. En ne nommant les titres des morceaux que par les simples lettres de l’alphabet, aucun parasitage quant au sens à donner à tel ou tel morceau laisse le champ libre à l’imaginaire. Le pouvoir évocateur de la musique en est ici magnifié. Ce qui importe, c’est l’empreinte que laissent les motifs musicaux sur notre peau, notre psyché.
Ainsi, nous n’allons pas téléguider votre pensée vers ce que nos ressentis nous évoquent à l’écoute de A ou B (ou du reste des titres de l’album). Néanmoins, il y a plusieurs choses qui apparaissent relativement clairement. Tout ici repose sur des bases plus ou moins répétitives, sur des pow wow de voix (des fredonnements sans paroles distinctes), sur une atmosphère proche du post rock ou des concepts albums expérimentaux de groupes tels que Can. Chaque morceau nous place dans un univers particulier, laisse apparaître une couleur, une envie, sur laquelle le groupe tisse une toile (d’araignée) de laquelle nous ne pouvons pas nous extraire sans y laisser quelques fragments de notre âme.
Viscéral.
Parce que, dès que nous mettons le disque en route, une magie noire se saisit de nous, capte notre attention pour ne plus la divertir (ou pervertir). Sorte de trou noir, ABCDEFG HI ! Annihile chez nous l’envie d’aller écouter aux portes de ce qui se fait ailleurs. Chaque piste dévoile petit à petit ses secrets, ses arrangements, maintenant nos sens en éveil et notre imaginaire sur le qui vive. Il serait vain de nier que des références se bousculent au portillon (allant de Can à Pink Floyd en passant par Thee silver mt zion ou Godspeed you ! Black emperor par exemple), mais NFL3 possède ce charisme monstrueux qui fait que sa musique ne ressemble, au fond, à aucune autre.
Malgré une formule d’enregistrement surprenante (chacun des membres à enregistré depuis chez lui ses parties, les assemblant sur la base apportée par l’un ou l’autre, jusqu’à un travail final en commun et en studio), l’aspect viscéral et brut (dans le sens spontané) de chaque morceau éclaire l’album. Si nous sommes en présence de rock, des éléments électroniques sont ici mis en place pour permettre au trio composé des frères Laureau, Nicolas et Fabrice, et de Jean-Michel Pirès de sampler leurs thèmes et d’y greffer une part de leur personnalité.
Force chamanique.
Nous retrouvons dans ce disque un esprit de transe, chamanique. L’espace qui entoure chaque note semble vibrer d’une intention particulière. L’ensemble est aéré, ne subit aucun remplissage intempestif, preuve que le groupe assume parfaitement sa maturité. Celle-ci n’est pour autant pas gage d’un déballage de technique. En effet, nous nous disons qu’avec un peu de matos, nous pourrions presque aboutir à un résultat similaire. Cet état démontre bien, au contraire, que NFL3 a tout d’un grand groupe car il laisse à croire que sa musique est facile à produire, à réaliser, alors qu’il n’en est évidemment rien.
La cohérence est de rigueur sur cet album anniversaire. L’homogénéité aussi. Mise à part HI !, dernier titre de l’album qui achève celui-ci par un morceau plus lumineux, guilleret, la tonalité globale est plutôt consciente et loin d’une insouciance juvénile, sans pour autant être plombante. En fait, ABCDEFG HI! Éveille nos instincts et quelque chose de plus profond encore qui est tapi en nous. Comme si NFL3 nous montrait un chemin menant à l’accomplissement de soi. Une seule chose est sûre, c’est que le groupe y parvient, à cet accomplissement, à merveille et le prouve avec une grâce foudroyante. Résultat : un album proche de la perfection.
LE titre d’ABCDEFG HI !
Voilà qui est bien malaisé de nommer un titre phare à cet album qui ne contient que des titres forts. Cependant, nous devons avouer que trois d’entre eux nous font forte impression, à savoir A, B et G. Notre coeur balance un peu plus pour B, que, pour des raisons déjà invoquées plus haut, nous n’allons pas vous décortiquer (pour ne pas polluer l’innocence de votre perception du titre). Nous l’aimons donc simplement pour ce qu’il est, et des fois ça ne fait pas de mal de ne pas en rajouter.
Relire la chronique de Don Nino, Rhapsody for the dead butterflies
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