[ ALBUM ] PIKKU, 5,3,2,1 voyage pour le pays imaginaire
Album 5,3,2,1 de Pikku (disponible le 15/11 chez Lafolie records/Inouïe distribution)
Sa vidéo Heartbreak avait déclenché chez nous la sirène d’alarme. Nous voyions en Pikku, lors de cette découverte, la digne héritière de Björk (ou Kate Bush). Cette impression est-elle confirmée à l’écoute de 5, 3, 2, 1 ? Tuons le suspense dans l’oeuf tout de suite, car la réponse est… oui ! Trois fois oui !
L’elfe Pikku.
Si Björk est l’elfe venue du froid, à savoir l’Islande, Pikku est celle venant de Pologne. De ce pays, elle garde la langue sur deux titres. Pour les autres, elle opte, avec sensiblement la même réussite, pour l’Anglais (5 titres), le Français (3 titres) et le Japonais (1 titre). Si ce grand écart entre les langues aurait pu donner un album hétérogène, il n’en est finalement rien car la musique de Pikku, ses ambiances et ses orchestrations, lient l’ensemble de façon serrée.
Sa musique est faite de cordes, de rythmiques électroniques, de cuivres (et de synthés, de guitares) de façon relativement minimaliste. L’ensemble des instruments s’entortille comme une liane autour d’un tronc commun formé par la voix de Magdalena Strój (le vrai patronyme de Pikku) et de ses lignes de chants. Si la voix de la jeune femme est assez déconcertante de prime abord car très aigüe, évoquant éventuellement celle de Kate Bush dans sa jeunesse, elle permet de créer un environnement onirique, digne de celui des contes de nos enfances.
La neige, la douceur, les mythes.
L’album ne ressemble à rien de connu. Nous sommes presque à la croisée d’une folk exotique avec la musique de jeux vidéo ou de films d’animation japonais. Nous imaginons d’ailleurs très bien Pikku chanter en kimono, derrière son micro, les yeux fermés tandis que, par la fenêtre, nous voyons la neige recouvrir le sol de son manteau blanc immaculé. Mais nous sentons un désir de s’émanciper de la part de la chanteuse qui ose s’aventurer en terrain électronique (Madame Raymonde) et de laisser un soupçon d’énergie rock envahir la plupart des morceaux (par le biais de l’électricité d’une guitare par exemple).
Nous imaginons également qu’une fée s’est penchées sur son berceau, un jour de grand vent, pour lui dire au creux de l’oreille que, non, ne t’en fais pas, tu chasseras le mauvais temps avec tes chants. Il y a dans 5,3,2,1 un côté touchant, presque enfantin, car les compositions de Pikku sont pleines de liberté, d’espaces que notre imaginaire s’empresse de combler par des images de plumes, de flocons bouleversés par la bise, par la douceur d’un baiser ou par la caresse qu’un enfant appose sur notre joue. Il n’y a là aucune forme de violence, pourtant…
Rien n’est creux.
À travers ses textes, Pikku est beaucoup moins enfantine que ne laisse présager l’ambiance de sa musique. Une certaine mélancolie transparaît de sa plume, une certaine colère même, parfois (J’ai connu la neige n’étant pas sans évoquer le réchauffement climatique par exemple, ou Madame Raymonde évoquant la déception amoureuse, tout comme Heartbreak du reste). Le contraste entre cette musique limpide et la tristesse des textes nous placent dans un sentiment ambivalent en jouant la schizophrénie (et on adore ! ).
Avec 5,3,2,1, Pikku nous ravit. La richesse des arrangements, la subtilité dont elle fait preuve pour nous raconter des tranches de vie simplement, sans faux-semblant, sans clinquant non plus, touchent directement au but. Totalement hors mode, elle propose un univers à nul autre pareil et, nous l’espérons, qui est sa marque de fabrique rien qu’à elle. Parce qu’elle pourrait aller très loin ainsi, et voire, peut-être, tutoyer la carrière de Björk à laquelle nous ne pouvons pas ne pas penser au long de ses onze titres aussi inspirés qu’inspirants !
LE titre de l’album.
Heartbreak nous plaît terriblement, c’est un fait. Deuxième single de cet album, il nous avait fait grosse impression lorsque nous l’avions découvert (et chroniqué ICI). Mais nous allons choisir, pour cette fois-ci uniquement, notre deuxième morceau préféré du disque, à savoir Nuku Nuku II, le morceau en japonnais de l’album.
Bon, nous n’allons pas vous la jouer façon image d’Épinal mais il est vrai que, sur ce morceau, nous imaginons sans trop forcer les pétales roses des fameux cerisiers s’envoler au ralenti direction le Mont Fuji. Il faut avouer que tout concorde pour nous emporter au loin, très loin, le barrage de la langue faisant en sorte d’éveiller simplement nos ressentis dans une farandole de douceur où pointe néanmoins une légère nuance de mélancolie. Mais le résultat est sublime, à l’image de cet album réussi.
Site officiel Pikku
Retrouver Pikku sur FB
On pense à Féloche