[ ALBUM ] BROEN, Do you see the falling leaves ?
Deuxième album du groupe norvégien Broen, Do you see the falling leaves (disponible chez Bella Union/Pias)
Nous pourrions vous mentir et vous dire que leur premier album avait laissé une empreinte profonde dans nos souvenirs, mais, pour dire vrai, nous n’avions jamais eu vent de ce groupe. Et pourtant, quel groupe ! Broen, avec Do you see the falling leaves ? nous happe, tel un trou noir, pour nous relâcher, loin, très loin d’ici, dans un état second. Explications.
Broen, mélange détonant de style(s) !
Nous ne nous attendions pas à cela. Nous avions vu la cover de l’album et nous nous attendions à un groupe pop, très tendance, très « comme tout le monde », et grand mal nous en a pris. Parce que Broen n’est pas comme tout le monde. Et pour s’en persuader, il suffit de moins de deux minutes d’écoute du premier titre (Where is passion ? ). Et encore, nous n’avons pas encore, au bout de ces deux premières minutes , la tonalité de toute la folie créatrice du groupe en perspective.
En effet, ce titre, jusqu’à sa troisième minute, s’annonce comme une sorte de musique new age, à base de nappes de claviers hypnotiques, pas franchement originales mais démontrant déjà un soin particulier apporté au son du groupe. Mais à la troisième minute, après quelques lignes de chant d’inspiration world music, avec quelques sonorités empruntées au jazz, survient un rap purement inspiré, génial dans cette rupture radicale du titre qui annonce de très belles choses à venir.
Do you see the falling Leaves ?
Ce deuxième titre confirme la première impression, entre nappes vaporeuses et lignes de chants élégiaques, entre inspirations pop et incartades jazzy, le morceau déroule les surprises avec une harmonie surprenante. L’un des fils conducteur réside dans la voix d’Anja Lauvda, absolument parfaite de bout en bout.
Do you see the falling leaves, du haut de ses 8minutes et 50 secondes ne manque pas de dérouter tant la linéarité qui en découle ne répond à aucune norme connue. C’est un peu comme si Broen n’avait jamais écouté de musique auparavant, que le groupe n’avait jamais pris connaissance du format couplet refrain, et c’est tant mieux ! La magie de ses compositions réside en partie dans ces brusques changements d’atmosphères, de rythmiques, de couleurs, tout en gardant une trame bien nette en terme de sonorité.
Les sonorités, justement.
Elles semblent toutes surgir des brumes du sommeil, comme habillées d’un voile cotonneux qui étoufferait un peu de sa puissance. Nous disons cela mais c’est totalement l’inverse qui se fait ressentir. En effet, ces notes à l’impact amoindri décuplent notre intérêt à leur encontre. Nous essayons de chercher la petite bête, et nous la trouvons dans ces basses qui, loin de provenir d’une guitare basse émanent d’un tuba. Et puis il y a ces accords de cuivres, très free, et ses bidouilles electro avant-gardistes. Bref, Broen brouille les pistes dans le magma profond qui émane de sa personnalité.
Comme si cela ne suffisait pas, il y a également tout ce qui se passe autour. Nous parlions d’une esthétique oscillant de la pop au jazz, mais nous rencontrons des émanations de ce que l’on nomme les musiques urbaines, mais également des musiques du monde, le tout avec une cohérence foutraque qui tient (nous ne savons pas comment) méchamment la route.
Cette alchimie de référence fonctionne à plein régime, surprend et séduit, comme si tout cela était bien naturel (mais ça ne l’est évidemment pas).
Magique Broen.
Pour nous, ce groupe est magique. Parce qu’il est loin de réinterpréter la musique. Au contraire, Broen, avec Do you see the falling leaves ? crée son propre sillon, entre exigence et coolitude, entre respect et insolence. Cette unité sur l’ensemble de l’album nous montre que le combo prend des risques et que ceux-ci s’avèrent payants.
Broen réveille des zones peu usitées de notre cerveau. Le vertige nous surprend par ce foisonnement d’idées, abouties, et par l’énergie qui irradie des 10 titres de ce deuxième album. Certes, l’album demande un temps d’adaptation, mais la richesse novatrice qui en découle demande bien quelque flexibilité de notre part. Un groupe à découvrir, quoi qu’il en soit !
LE titre de l’album
Nous, nous adorons le titre Free World. Parce qu’il installe un climat presque tribal en début de morceau, avec des percus vrillées par des bidouilles électro, avant que la voix surgisse sur des rythmiques jazzy/funky efficaces. Le groove est là, le morceau décolle en toute quiétude, reste aventureux dans ses arrangements, insiste sur le côté onirique et mythologique de la musique.
Nous oserions dire que nous sommes au croisement de la scène de Bristol avec celle de la musique indienne. On ouvre donc bien grands nos chakras et on se laisse bercer par ce titre relativement court qui pourtant nous embarque loin des sentiers balisés.
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Le soundcloud du groupe
On pense à Pikku (dont nous chroniquerons très prochainement l’album)