HORANAUTS, How to trade curses.

horanauts how to trade cursesPremier album déjà disponible

Après un premier EP datant de juin 2021 et répondant au nom de Carvery, Horonauts a déboulé, presque sur la pointe des pieds, avec son premier long format en novembre dernier. Se développant comme dans une parenthèse (les morceaux d’ouverture et de fermeture atteignant allègrement les 7 minutes, pour des durées plus raisonnables à l’intérieur de ces mêmes parenthèses), How to trade curses s’avère un très très bon disque de rock, à même de satisfaire les fans de Muse (la voix du chanteur ressemble pas mal à celle de Matthew Belamy, mais un Matthew Belamy qui aurait pris des cours de chant et qui ne serait pas à bout de souffle toutes les deux phrases), de metal et de grandiloquence pop.

Originaire de Paris, ce groupe , dont nous n’avons que peu d’informations, livre un album homogène, compact, mais qui ouvre ses chakras très loin dans la stratosphère. En effet, le titre d’ouverture impose d’emblée sa patte. Effectivement, si l’on cherche une filiation, le nom de Muse s’impose, mais également celui de Placebo (sur le premier album de ces derniers surtout) Pourtant, Horanauts développe son propre univers, marqué par des attaques pêchues, évoquant certains groupes metal, de longues phases atmosphériques et contemplatives, ose une électricité parfois débridée, tout comme une folk apaisée ( Carnation en ce sens nous met littéralement les poils).

En plus de cela, les montées de sève grandioses et décomplexées, qui tendent presque à ramener les compositions du groupe du côté opéra rock, développent un imaginaire nourri à l’héroïc fantasy (nous sommes aidés en cela par le très chouette artwork du disque).

Cavalcades.

Nous sommes souvent projetés dans une musique qui prend le temps d’imposer sa marque de fabrique. En développant chacun de ses thèmes sans se presser, en apportant un soin tout particulier aux mélodies, Horanauts s’inscrit à contre-courant d’une instantanéité « vite écoutée vite jetée aux oubliettes ». En martelant son propos avec force et délicatesse, le groupe demande que l’on se penche à de multiples reprises sur son propos, ce que nous faisons de bon gré. Les nuances ne tardent pas à arriver et la narration de chaque composition développe ses paysages presque sans forcer.

Nous avons d’ailleurs du mal à nous dire que presque tous les titres ne dépassent pas les 5 minutes tant ils nous imprègnent de leur histoire. Conté par une voix élastique, capable d’aigus relativement remarquables, celle-ci ne manque jamais de nous émouvoir, de déclencher chez nous une sensation proche de celle qui devait être propre à la chevalerie. Nous sentons donc une certaine noblesse, contrebalancée par des guitares acérées, aiguisées et tranchantes comme des couteaux. La relative brutalité de l’électricité, véritablement proche du metal par moments, ne bascule jamais dans le trop. Sans doute parce que le groupe préfère évoquer plutôt que démontrer une certaine violence émotionnelle.

Compositions progressives.

Sans sombrer non plus dans les pires excès du rock progressif (à savoir des enchainements dont on peine à comprendre le sens), How to trade curses propose des compositions évolutives dont on ne perd jamais le fil. Les instrumentations sont riches, variées, et laissent apparaître des instruments inattendus (dont une harpe nous semble-t-il sur Contingency) ou des arrangements qui permettent de nuancer le déroulé d’un titre. Cette variété, qui calme souvent les ardeurs guitaristiques, s’avère bienvenue.

Bon point également sur l’usage des claviers qui ne sonnent jamais cheap. On a beau dire, un piano simple fait toujours son effet (Unwell), mais les nappes qui surgissent ici ou là sur l’ensemble du disque n’appauvrissent en rien le propos de l’opus. En restant dans des sonorités plutôt actuelles, avec tout de même un petit œil dans le rétro pour certaines d’entre elles (et c’est bienvenu, notamment sur quelques parties de guitare), le groupe s’inscrit dans une drôle de temporalité, quelque part entre un monde de contes et de légendes et le monde moderne qui est le nôtre. Loin de dérouter, cela nous enivre et nous permet de mieux larguer les amarres pour ce lieu inconnu qu’est how to trade curses.

Avec ce premier long format, Horanauts nous séduit de la plus belle des manières, c’est-à-dire sans s’imposer par la force, mais avec la marque de fabrique des vrais bons groupes, ceux qui possèdent une âme véritable. Ici, elle se traduit par une recherche appuyée sur les contrastes, sur les lumières, et surtout sur un caractère vibrant que restitue à merveille l’un des vrais points forts du disque, à savoir la voix ultra expressive du chanteur. Fort heureusement, les autres membres du groupe sont au diapason et offrent des prestations techniques de très belle volée, ce qui empêche le groupe de se scinder en deux entités distinctes mais au contraire d’affirmer une vraie personnalité de groupe.

A découvrir urgemment !

Patrick Béguinel

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