WAILIN’ STORMS – The Silver Snake Unfolds
paru le 21 juillet 2022 chez Gilead media-Antena Krzyku Unc
N’y a-t-il pas de perspective plus réjouissante que de se laisser dériver ? Le postulat d’une vie en apparence normale qui l’espace d’un instant s’exonère des contraintes ? Une place donnée au rêve, un court répit pour s’évader. Désillusion de ne croire en rien et de tout accepter quand la réalité tentaculaire reprend sa place inexorablement. Wailin’ Storms vient de publier une oeuvre crépusculaire dont les racines sont issues de ressources intimes, insécables.
Album de la consécration
En convoquant les fantômes de paysages désolés, de lieux reculés, le quatuor originaire de la Caroline du Nord, retranscrit au travers de son écriture, tout un pan de l’imaginaire emprunté au folklore et aux traditions locales. The Silver Snake Unfolds déploie une myriade d’ambiances, on entre dans une fièvre induite par un état de conscience modifié, comme dans une transe interlope.
À la surface d’un marais émerge une forme sinueuse, dont les aspérités se délimitent par le glissement entre l’eau et la vase avant d’être englouties. Rattle avait précédemment provoqué ces sensations, comparables à un voyage initiatique, la voix torturée de Justin Storms exhorte à qui veut l’entendre ses visions mystiques.
La composition répond à une mission inconsciente permettant d’associer deux pensées, celle du compositeur et celle de l’auditeur, au travers des mots ou de la trame mélodique. Rares sont les musiciens qui écoutent leur propre disque. L’aspect conceptuel de la musique dépend de ces intermédiaires, perçus comme des signaux émis depuis une balise dont la finalité est de nous guider, nous orienter ou au contraire, nous éloigner des rives du connu.
Visions et fièvre mystique.
Le point d’ancrage n’est pas l’introduction de cet élément « irrationnel » qui affecte la musique du groupe, dans le cas présent je vous mets en garde, voilà bien l’essentiel de ce disque, une brèche temporelle aux antipodes des productions noise, comme un rush d’images suggérées par un état second. L’éventail d’une perception extralucide échappant au commun des mortels.
Wailin’ Storms est depuis entré dans ma vie de manière intime, une cartographie d’émotions dont la palette monochrome vire au rouge vif. Un vertige perceptible dès l’incandescent » in the heart of the sea« , plongée abyssale au creux des éléments. Une déstructuration en 8 séquences dont l’énergie rythmique recompose les formes, Broken into three vient éparpiller la matière en nuances mutantes.
Les Compositions de Wailin’ Storms s’apparentent à une conscience aigüe du réel, sans jamais en forcer le trait. Un substrat à l’ordinaire, aux contours vaporeux, une identité libérée de ses chaînes, l’esprit liquéfié voyage au travers de multiples dimensions.
Wailin’Storms crédit Andy Marino
Une terminologie rédemptrice.
The Silver Snake Unfolds est un disque dont l’unicité est en résonance avec l’esprit du groupe, on y entend des réminiscences héritées du blues, transposées dans un swamp rock doom où la tension permanente est d’une maîtrise bluffante. On se retrouve genoux à terre, implorant les cieux pour prolonger la durée d’immersion que procure ce disque magistral.
Lien officiel : https://www.wailinstorms.com/album/the-silver-snake-unfolds/
Label : https://gileadmedia.bandcamp.com/album/the-silver-snake-unfolds
Franck irle
Elevé dès mon enfance aux vinyles, initié au piano et à la guitare, première révélation avec les Beatles à l’âge de 8 ans issue de la discographie de ma mère. Autre révélation avec Jack Kerouac, et la beat generation durant mon adolescence. Je me suis décidé à écrire des chroniques sur un blog dédié à la musique Francophone souterraine ( Jean Le Fennec, Wertheimer, Alain Kan…) et depuis ? Je dévore les disques au quotidien, participe avec WhatTheFest en tant que bénévole pour des concerts sur Montpellier ( Lingua Ignota, Anna Von Hausswolff). Ci-joint une photo polaroid un peu floue ! Je compose aussi et travaille sur un projet solo, Zero Circle : https://zerocircle.bandcamp.com/
Lire une autre chronique de Franck ici
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