Playlist 14, 02/04/21, dancer, raconter, vivre.
Nouvelle sélection musicale hebdomadaire.
Avec cette playlist 14, nous donnons la parole à la fois à la danse et à la parole. Pour la première, c’est évident : il y a du rythme, du lâcher-prise (et dieu sait que la période actuelle mérite que nous évacuions la pression), sans jamais perdre en aura positive, mais pas que. De l’autre, le choix des mots, ceux qui accompagnent, qui disent l’état du monde, l’état de l’âme aussi, et qui, forcément, nous électrise et nous bouscule. Dans un cas comme dans l’autre, nous nous laissons guider dans des univers forts, prometteurs, ou forts prometteurs, avec toujours ce petit élément supplémentaire qui fait la différence.
TWO SEVENS
Nous commençons cette playlist 14 avec un groupe que nous accueillons pour la deuxième fois. Effectivement, nous vous proposons de (re)découvrir la musique du groupe britannique Two Sevens avec un nouveau titre, Modern age. Mais cette fois-ci, nous les plaçons en tête de playlist, et c’est amplement mérité tant ce titre nous parle. En effet, il représente un peu toute la coolitude anglaise lorsqu’il s’agit de proposer une musique vivante, qui paraît totalement spontanée, innée.
Avec sa rythmique imparable, presque électro, avec ses lignes de chant percutantes, avec cette classe incroyable dans la voix, les arrangements, une composition qui colle au bitume, Two sevens régal, et le mot est faible. À la fois rock, électro, portant en elle un léger soupçon post punk, le morceau nous entraînerait facilement sur la piste d’un club si toutefois ceux-ci avaient le droit d’ouvrir leurs portes. Tant pis, c’est à domicile que nous dansons, c’est toujours mieux que rien, mais un tel morceau se doit d’être joué en live pour embarquer la foule dans un pogo (ou tout autre danse défouloir) frénétique, simplement parce que Two sevens possède ce petit truc qui fait tilt et qui peut rallier un large public à sa cause.
JUNE AND THE JONES
Pour être honnête, nous connaissions le groupe et n’aimions pas trop. Mais une surprise radicale fait qu’aujourd’hui, nous accrochons avec June and the Jones. Cette surprise, c’est le passage de l’Anglais au Français dans le texte. Cela nous étonne nous-même, plutôt adeptes du chant dans la langue de Shakespeare. Mais nous n’arrivions pas à accrocher, parce que, peut-être, cela manquait de personnalité.
En changeant pour le français, cette petite touche qui nous manquait apparaît ici au grand jour. Sans vouloir dire au groupe composé de 2 frères et une sœur ce qu’il doit faire, nous les encourageons fortement sur cette voix parce qu’ils utilisent le français comme une langue anglo-saxonne ! Ça sonne, très bien même, mais avec une identité qui fait plus sincère (pas qu’elle ait été fake auparavant, mais nous les sentons ici totalement en phase avec eux-mêmes). Cela se traduit par un Marcher dans le noir à la fois pop et disco, dansant, sans pour autant que le texte lorgne la médiocrité. On aime particulièrement ce petit groove irrépressible qui s’empare de nous dès le début du morceau. Et on souhaite vraiment que le groupe poursuive en français pour la suite de leur aventure, ça vaut le coup (mais ils font ce qu’ils veulent, hein?).
Jay
Morceau hybride pop et disco lui aussi, entre Pink Floyd et Moroder, avec néanmoins un petit aspect Daft Punk qui ressort par moments, et un autre à la MGMT, Jay n’aurait-il pas tout compris avec Edge of the night ? Le morceau est ultra efficace, ultra dansant, bien plus riche qu’il y paraît à la première écoute, il déroule ses charmes sans que vous vous en rendiez compte et vous commencez dès lors à esquiver quelques pas de danse dans la salle de bain ou la chambre à coucher.
Le sens du rythme y est monstrueusement efficace et un très bon travail est effectué sur les différentes tessitures sonores. Comme pour le morceau de June and the jones, Jay propose un titre entre divertissement pur et musique pour mélomanes plus avisés, et on aime quand les deux se marient à la perfection.
OSTED
Nous poursuivons cette playslit 14 avec un morceau à mi-chemin entre rock et post punk (la frontière est plus que vague ici). Osted propose avec Sarajevo une plongée dans l’Angleterre des 80’s, malgré le titre du morceau, mais totalement en phase avec les productions actuelles en la matière. Le couplet est efficace, le refrain dévastateur, et nous nous retrouvons dans une zone de danger, portés par une forme d’urgence émanant des guitares et de cette batterie martiale (toujours sur le refrain).
Le chant dégage lui aussi cette urgence, néanmoins teintée d’un léger sentiment fataliste, comme si rien ne changeait vraiment, malgré les consciences qui s’aiguisent. Un titre tel que celui-ci doit s’avérer brûlant sur scène, et il nous tarde d’en faire le constat. Ce qui malheureusement n’est pas pour tout de suite… Sinon, pour plus d’infos, Osted est de Metz et leur EP à paraître fin avril a été Mixé et arrangé à Londres par Kenny Jones, Alchemy Studio (OASIS, THE SMITHS, BAUHAUS, BJÖRK et bien d’autres). On en reparlera à coup sûr !
HERVÉ CAPARROS
Autre style, presque aux antipodes de celui d’Osted, le jazz pop and roll d’Hervé Caparros. L’envie ici est de faire sortir la guitare jazz de la masse, pour lui offrir plus d’aises en y incorporant un peu de mordant rock. Cela produit donc un Fake generation troublant, inventif, expérimental, donc forcément intéressant. La base tripante de la rythmique initiale laisse apparaître les couleurs du jazz, avant que la guitare ramène la lumière sur elle de façon presque éhontée.
L’électricité, savamment dosée, donne au morceau des allures progressives, déroute par moment parce que déjouant les codes des deux styles (rock et jazz donc). Au final, nous nous trouvons avec un morceau presque instinctif, qui déclenche inévitablement les passions les plus brûlantes. La lecture jazz et rock (et électro aussi, ne serait-ce que pour la base rythmique) de Hervé Caparros s’avère des plus grisantes, et délivre sa bonne petite dose d’endorphine. Et c’est tant mieux !
VICTOR PAVY
Shine, c’est le swinging London, c’est le rock un peu garage mais pas trop, c’est l’évidence d’une mélodie, c’est du soleil, c’est du bonheur, c’est du British pur jus, mais surtout, c’est du bien fait. Contre toute attente, Victor Pavy est français, pourtant dans ce morceau, il synthétise une époque en l’intégrant dans un environnement d’aujourd’hui. Vintage mais moderne, avec un côté un peu blasé dans le chant, un peu détaché qui donne du charme (et gomme un chant parfois un peu approximatif), Shine fait du bien par où il passe et fait souffler un vent de fraîcheur sur la morosité ambiante. Et ça, c’est toujours un peu magique, non ?
FLEUR BLEU.E
Un autre titre avec une ambiance à l’anglaise, mais en français dans le texte. Le charme dégagé ici, par cette mélodie immédiatement assimilable, par ce rock psychédélique tendance cool, nous ravit au plus haut point. Et surtout, opter pour un chant en français sur un tel titre permet à Fleur Bleu.e de sortir de la masse. On se retrouve donc l’esprit légèrement enfumé, dans une sorte de rêve éveillé qui permet de décrocher un peu de la réalité, ce qui ne fait pas de mal.
Notons tout de même les paroles, loin d’être optimistes, mais qui posent au contraire un regard acerbe sur la société qui est la nôtre. En ce sens Stolt 89 se doit d’être écouté attentivement, pour réfléchir à toutes les conséquences de nos actes.
RIDE THE TIGER
Nous nous demandons si ce nom de groupe n’est pas un clin d’oeil à notre cher président qui encourageait certains d’entre nous, probablement les derniers de cordée, à chevaucher le tigre alors que la culture commençait sa lente et terrible agonie (rassurez-vous, la culture va encore moins bien qu’à l’époque, aucune raison de s’en faire donc)? Toujours est-il que derrière le patronyme se cache un groupe qui ose l’amalgame des styles en un seul titre, comme le prouve ce The green and fresh quest qui, sans un minimum de rigueur et de sobriété pourrait ressembler à une benne à ordure. Or ici, il y a de la rigueur, une certaine forme de sobriété, mais surtout un talent indéniable qui font que la sauce prend dès l’entame du titre.
Nous ne vous cachons pas ne pas être particulièrement fan du refrain « nanana », seul point un peu faiblard de ce morceau qui réunit en son sein un peu d’Eminem, un peu de Lenny Kravitz, et plein de trucs entre les deux. Ride the tiger a réussit à capter le bon et laisser le mauvais de côté, ce qui rend le titre efficace et rapidement magnétique. Pour autant, ce choix esthétique nous laisse interrogateurs sur un plus long format. Nous sommes en effet curieux de voir si l’équilibre est maintenu sur ce fil tendu relativement casse-gueule sur la durée d’un LP. À voir donc !
L’ORCHIDÉE COSMIQUE
Il faut de tout pour faire de cette playslit 14 une réussite, ou une surprise. Avec une basse, quelques machines, une dizaine de boîtiers DI et de la fuzz, L’Orchidée cosmique nous livre un morceau prenant, qui puise dans nos réserves mais nous hypnotise. C’est avec trois fois rien, mais avec pas mal de réussite et de talent, que l’on peut obtenir un morceau comme The green thing. Capté live au Brise glace (Annecy), le morceau, post rock, se révèle ambient abrasif. Il nous fait très vite perdre nos repères, s’installe en nous, délivre un frisson électrique où se mêlent un sentiment d’urgence et un côté légèrement flippant avec cette voix émanant qu’un poste de télé, voix fantomatique et annonciatrice, dans notre imaginaire, d’une quelconque catastrophe.
L’ambient reste souvent un style répétitif mais par un jeu d’ajouts d’effets, The green thing ne lasse pas. En revanche, il parvient à nous entraîner dans une autre dimension en nous extirpant de notre enveloppe charnelle pour nous propulser dans nos pensées les plus hermétiques. Et ça, c’est toujours un peu magique.
MARTIN LUMINET
Nous n’allons pas vous faire l’affront d’une traduction de texte, mais juste poser cette question : Monde est-elle une chanson blasée ou une chanson réaliste ? Avec Sobriété, avec des notes mineures, avec une voix portant une mélancolie profonde mais lumineuse, Martin Luminet dresse le constat du monde qui est le nôtre, déshumanisé (en partie), sur fond d’électro cardiaque. Le tout est bien fait, et le morceau nous émeut beaucoup. C’est pourquoi nous le partageons avec vous. Parce que nous nous y retrouvons, en très grande partie, sur cette incompréhension d’un monde individualiste duquel est écrasé toute forme de différence. Losers, nous le sommes, à la marge, nous le sommes, et ce monde devrait être autre chose qu’un champ de bataille si seulement nous nous donnions la main plutôt que des coups de couteaux.
HASSAN K
Vous savez que nous aimons le surf rock, c’est un fait. Dans le cas de Hassan K, ce surf rock est associé à des sonorités perses qui lui donnent une autre dimension, mais ne reniant en rien ni ses influences orientales, ni l’esprit surf. Le mélange s’avère plutôt excitant, surtout que Gardgiri est accompagné d’un clip absolument génial. On vous laisse découvrir ça. Ce clip, inspiré par le visionnage de chaînes télévisuelles iraniennes, est un petit délice d’imagination et nous transporte dans un univers complètement à part. Bref, on aime beaucoup !
DAZLUZ
Besoin de vous défouler ? On vous propose ce morceau, Grave, de Dazluz, titre électro violemment abrasif, hardcore mais possédant des charmes bien concrets. On aime le mariage électro et trad, on aime ce beat qui déboule et ravage tout, on aime le côté finalement très rock des tessitures sonores. Si ça ne vous met pas en transe, on n’y comprend plus rien. Quoi qu’il en soit ce morceau est à découvrir !
Dazluz (de son vrai nom Kevin Brezolin ) est brésilien, et est producteur. Il a travaillé pour plus de 300 artistes différents. Grave est inspiré par l’impression de chaos qui règne au Brésil depuis plusieurs mois, c’est un cri de désespoir. Et ça, pas besoin de comprendre la langue pour le ressentir dans nos tripes.
NO MONEY KIDS
Terminons cette playlist 14 avec un groupe que nous suivons ce groupe depuis un moment puisqu’il s’agit des No money kids. Voir la progression qui est la sienne est très intéressant, pour ne pas dire révélatrice d’une évolution à bien des égards. Le groupe quitte progressivement, à mesure que les années avancent, l’esprit rock et blues qui était le sien à l’origine.
Avec Why am I so cold, les atours électro se font plus présent dans les rythmiques (celles-ci étaient plus binaires par le passé), plus étoffées, avec plus de nuances aussi, tandis que l’esprit rock se tourne légèrement vers une forme pop, (très légèrement, en tout cas sur le refrain) psychédélique. L’ensemble ne manque pas de charme, demande à écouter le prochain opus du groupe qui ne devrait plus trop tarder à sortir et qui s’appelle Factory. On attend donc cette sortie pour vous en dire plus !
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