FEU! CHATTERTON, Live au Krakatoa (Bordeaux)

feu chattertonUn Volcan d’Amour

Mercredi 24 Novembre 2021. Il y a des artistes qui filent aussi vite que des étoiles filantes et d’autres qui ornent et s’installent dans l’espace musical tels des satellites, des astres brûlant de mille feux. Des artistes sur lesquels nous pouvons compter. Ils sont nos repères, nous accompagnent dans nos vies de quidam, parfois déboussolé. Ces hérauts d’une nouvel ère sont ces vieux amis à qui nous pouvons tout dire, et avec qui il n’est pas nécessaire de parler pour se comprendre. Mercredi soir, accompagné de ma moitié, nous avions le Saint-Graal en poche, voire deux. La place pour Feu! Chatterton, (complet très rapidement) et least but not last, le sésame qui ouvre toutes les portes, un QR code en guise de pass sanitaire.

 “bon concert et bonne soirée à vous”

Sous la nuit sombre, nous nous dirigeons vers le volcan. La salle du Krakatoa illumine la rue et la foule, par petits groupes, se concentre autour de ce temple. Le Kraka (pour les habitués) existe depuis plus de 30 ans et a vu passer moultes artistes en tout genre, des plus chevronnés aux jeunes pousses, prêts à conquérir les scènes de France et de Navarre. Programmation implacable et impeccable, convivialité et proximité. Ni trop grande, ni trop petite, j’affectionne tout particulièrement cette salle. Nous partageons une blonde (rituel d’avant concert) dans la file d’attente, fouille obligatoire, présentation du pass sanitaire et des billets, suivi d’un sourire, nous souhaitant “bon concert et bonne soirée à vous”, nous sommes dans la place. Direction le bar, un regard circulaire, me permet de scanner la population, le public est large en termes d’âge, plutôt bon chic bon genre, à la fois rock et bobo (même si ce terme ne veut plus rien dire). Bref, pas de punk à chien ou de hard rockeur à l’horizon.

Armés de nos deux pintes de chouffes, nous ouvrons la porte qui nous fait basculer dans une autre ambiance. Lumières tamisées, foule parsemée. La première partie est déjà commencée. Quel job ingrat! Mais passage obligé pour se faire connaître. Faire la première partie d’un groupe comme Feu! Chatterton reste une belle vitrine. Nous nous faufilons, tout en sirotant notre gobelet à l’effigie des trente ans du Kraka. L’auteur-compositeur-interprète Marc Desse défend son album éponyme, sorti en juin 2021. Il chauffe la salle et nos cœurs avec ses textes en français, sa voix délicatement traînante, ses mélodies pop, aux sonorités new wave, sa sympathie sincère et spontanée avec le public. Nous retenons des morceaux comme Si Tu veux, le très langoureux Geste Sentimental, la déclaration d’amour pour Paname avec Paris Je t’aime, même si ici les Bordelais, (fidèles à la Belle Endormie) restent un peu timides pour fredonner cet hymne à la capitale.

« Ça va faire la quatrième fois”

Première partie terminée, le public sort de l’ombre et la salle commence à se remplir de plus en plus. Ça commence à jouer des coudes, les plus petits évitent de se retrouver derrière le géant. Ma chouffe est finie. Je me tâte à retourner au bar reprendre la même et vider ma vessie repue par la première. Stratégiquement ce n’est pas une bonne idée car plutôt bien placé. Je discute avec deux couples d’une cinquantaine d’années devant moi. “Vous les avez déjà vus?” Réponse immédiate. « Ça va faire la quatrième fois”. “Ah ouais, quand même! moi la deuxième fois, ils sont vraiment top en live”. Derrière moi, ça scroll sur Eurosport pour vérifier le score du match Manchester City – PSG. En musique d’attente, nous avons droit à Charlotte Gainsbourg ou encore Blonde Redhead (Je suis aux anges, merci le Kraka). La lumière vacille, les premiers hurlements se font entendre.

Les quatre musiciens, Antoine (Basse), Clément (guitare/clavier), Raphaël (batterie) et Sébastien (guitare/clavier) entrent sur scène, suivis par Arthur (chant).  C’est parti pour presque deux heures de show avec nos cinq dandys parisiens. Arthur a le sourire communicatif aux lèvres. Ils ouvrent le bal avec le très inclusif morceau, Compagnons. « Compagnons des mauvais jours, je vous souhaite une bonne nuit”!!! La salle ne manque pas de chantonner le morceau, C’est en regardant et en écoutant la foule, que je me rends compte que Feu! Chatterton avec ce troisième album réussit le job, à la fois à confirmer leur talent (même si là il n’y avait pas beaucoup de doute) et à montrer qu’ils savent se renouveler mais aussi à conquérir de nouvelles âmes.

Osmose

Pendant plus d’une heure, le groupe alterne entre des morceaux de leur premier album, Ici le jour (a tout enseveli) et leur dernier album, Palais d’argile, qu’ils viennent défendre. Ils nous offrent donc Ophélie, rock à souhait, le morceau Côte Concorde, la fortune de mer Toscane. Vai a bordo della nave Cazzo !!! Après avoir pris la mer, en V nous survolons le volcan du Krakatoa telles oies sauvages avec le titre Boeing. Turbulences assurées. La Mort dans la Pinède, chanson d’amour adolescente, entre envie et refus de s’abandonner résonne comme une première fois. Mais c’est aussi ma première fois avec Feu! Chatterton! C’est avec ce morceau que tout a commencé.

Quel bonheur!!! La salle est en osmose, l’ambiance est féérique. Je tourne la tête, regarde ma princesse, elle aborde un sourire éblouissant, et sautille dans tous les sens. Le public est comme électrisé. Si la foule est aux anges, le quintet n’est pas en reste. Les musiciens sont en transe.  Arthur a l’art et la manière de communiquer et partager son ivresse et son allégresse avec la foule bordelaise. Le groupe entonne le politisé Écran Total, le morceau Cristaux Liquides à la fois cyberpunk et nostalgique d’un monde passé. “Oh mange un cookie! Les navigateurs veulent mieux te connaître. Fais-leur coucou. Oh mange un cookie ! Les navigateurs sont à la fenêtre”.

Sur le morceau Un Monde Nouveau, Arthur se lève sur la barrière qui nous sépare de la scène, une envie de communier, de partage. “Que savions nous faire de nos mains ? Presque rien Presque rien Presque rien. Se prendre dans les bras S’attraper dans les bras Ça on le pouvait Se prendre dans les bras S’attraper dans les bras”. Il faudra attendre les derniers morceaux pour entendre des titres de leur second album L’Oiseleur. Sur le titre Souvenirs, nous sommes pendus aux lèvres de cet Amant du Parnasse, avant de partir dans une frénésie totale avec le morceau La Fenêtre.

Les gens ont le sourire et ça fait du bien

Nos cinq gentlemen enfoncent le clou pour clôturer ces presque deux heures de concert avec le titre iconique la Malinche, cette femme qui devint esclave et maîtresse de Hernan Cortès. Puis pour conclure définitivement avec cette balade frugivore sur les routes de l’Île de Beauté, avec Sari d’Orcino. “Le ruisseau est plein de tes rires. Je me baigne dedans. Quelle heure est-il, où atterrir?”. Le concert se termine sous une pluie d’applaudissements, une ovation éclaire la salle. Un sentiment d’amour, de légèreté, d’altruisme, et de tendresse flottent dans l’air. Les gens ont le sourire et ça fait du bien de voir ce petit monde heureux.

Je reste toujours étonné par la magie qu’un simple moment de communion, et de partage, puisse produire autant d’enchantements et d’euphorie. La dernière fois que j’ai ressenti ce genre d’émotion après un concert, c’était le 13 Février 2019, et déjà à ce moment, c’était avec les Feu! Chatterton. Un grand merci aux Feu! Chatterton et au Krakatoa car ce concert restera gravé au plus profond de moi comme un souvenir doux, enivrant et exquis.

LGH

LGH
(Le Gosse hélicoptère) j’adore découvrir de nouveaux artistes encore inconnus du grand public
et chercher ceux qui dans le passé ont fait ce qu’est la musique aujourd’hui.
La musique m’accompagne en permanence et tient une place primordiale dans ma vie.
Mon maître-mot est l’éclectisme même si mon cœur balance pour le rock sous toutes
ces formes. J’affectionne également la littérature et plus particulièrement la littérature
anglo-américaine (Bret Easton Ellis, Don Delillo, Jonathan Franzen,…).

Relire la chronique de The great destroyer

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