EP VRAC 4, MDL, YUNG LEO et KARABOUDJAN
3 EPs sinon rien.
EP vrac 4 revient sur 3 EPs au fort potentiel. Dérivant de l’univers synthétique à une musique plus acoustique, il y en a pour tous les goûts, et surtout pour les amateurs d’artistes et groupes qui sortent des normes. A découvrir sans bouder son plaisir !
MLD, We Are (disponible le 24 juin chez Les Airs À Vif)
Avec ce nouvel EP, MLD nous invite à nous émouvoir dans un univers synthétique, dystopique, qui brouille les frontières entre musique électronique et pop musique. We are est un mini album de 5 titres qui évoque une guerre entre humains et machines, mais s’avère potentiellement moins glauque que celui émanant d’un Terminator par exemple.
La musique du musicien, Stéphane Mourgues ( dont MLD est le projet solo, mais qui œuvre au sein de Hello Bye Bye, DJ Moule), s’avère à la fois sensible, propice à l’imaginaire et à la danse. Un titre comme Incantation n’est pas sans rappeler la scène techno, mais un titre comme I love my robot évoque quant à lui plutôt une pop électronique à la manière de Air (on pense à Electronic performers). Ainsi, MLD propose une palette variée de plaisirs, allant de la pièce sensible, mélancolique, à celle plus « défouloir ». Pourtant, jamais nous ne basculons totalement dans l’une ou dans l’autre, car, tel un filet de sécurité, les émotions nous parviennent sans filtre.
Against the machine
Elles peuvent être pessimistes, alarmistes, mélancoliques, mais laissent néanmoins toujours une place, malgré l’aspect légèrement mélodramatique qui est le leur, à la lumière et à l’espoir. Bien sûr, l’artiste (il faut savoir qu’en live, MLD joue sans ordinateur, simplement avec des synthés analogiques synchronisés entre eux afin de garder l’aspect imprévisible de l’acte musical) pointe les dérives d’une société qui s’informatise à outrance. Pour autant, il n’oublie pas de produire une musique pleine d’humanité. Un paradoxe en quelque sorte, mais chatoyant, fort, émotionnellement chargé, de quoi nous amener à réfléchir tout en s’évadant dans les nuances de la danse la plus primale.
L’EP est une petite réussite, qui a su nous charmer dès ses premières secondes, qui bénéficie d’une superbe production, bref, que nous vous conseillons vivement !
YUNG LEO, Happy Thanksgiving D… Heads (déjà disponible)
Pas besoin de vous faire un dessin quant à ce titre d’EP pour le moins provocateur (Joyeux thanksgiving têtes de noeud, littéralement). Yung Leo brouille cependant un peu les pistes avec celui-ci. Si elle évolue effectivement dans un genre d’urban pop, elle le fait de manière totalement inédite, en y intégrant une bonne dose sensibilité organique (en évitant le piège classique de l’outrance facile).
Oublié les sonorités que l’on entend partout et à toutes les sauces (qui sont bien souvent de pâles copiés collés les unes des autres) sur les ondes. La démarche ici se veut proche du corps, proche du ressenti, profond, intime et surtout indé. Ici, rien de mainstream car l’artiste canadienne joue en effet sur les sonorités pour nous offrir un univers ouaté, parfois étouffé, duquel émerge, de façon claire, des éclairs de vie éblouissants. Le contraste entre intimité dévoilée et aspects plus dansants (le beat sur Cold pourrait presque se rapprocher de l’univers des clubs) s’avère totalement séduisant et surprenant. D’ailleurs, l’ensemble pourrait presque paraître superficiel s’il n’était pas si chargé en âme et en émotion.
Fière et indépendante
Ainsi, la musicienne joue sur les antagonismes, évite les poncifs, impose son interprétation et sa sensibilité au service d’une musique qui y trouve de véritables lettres de noblesses. La démarche artistique est ici totalement lisible, là où d’autres surfent sur le genre urban pop pour vendre. Pas de ça chez Yung Leo. Les 4 compositions qui peuplent l’EP s’avèrent à la fois variées, fort différentes les unes des autres, mais portent en elle une patte qui fait des étincelles de façon brillante (elle est secondée,pour ce faire, par Mike Clay, Tim Buron et Connor Seidel. Il n’est donc pas étonnant que Yung Leo fasse déjà parler d’elle outre-Atlantique. Mais aucun doute, elle devrait aussi faire des ravages de ce côté-ci de l’océan également. Une future grande !
KARABOUDJAN, La lagune (déjà disponible)
Il y a, dans La Lagune de Karaboudjan, un petit truc qui fait penser à la Mano Negra, au Who, au punk, au rock alternatif, mais aussi à la poésie, à la pop et à la chanson française, le tout avec une pointe de world music. Un mélange détonant, qui peut paraître totalement improbable mais qui dégage au contraire un caractère bien trempé, se situant quelque part entre rage et amour.
Les attaques sont mordantes, tout autant que les mots sont posés. Les ambiances dégagent ce parfum étrangement do it yourself, mais totalement maîtrisé, comme si l’aspect bancal exprimé dans ce papier n’avait aucun lieu d’être. Le duo en effet s’exprime parfaitement en fonction de ses goûts, de son vécu, ce qui fait de La Lagune un premier EP au charme totalement addictif. Il possède en effet une personnalité relativement unique dans l’univers rock français. Ici, pas de prétention, pas de cette envie d’en mettre plein la vue, mais simplement de s’exprimer de façon spontanée, en y mettant néanmoins les formes.
En poésie
Musicalement, un aspect folk se dégage par l’utilisation d’instruments acoustiques, guitare, banjo, Saz (luth turc), vite contrebalancé par la puissance de l’électricité et le bon vieux grain d’amplis à lampes vintage. Guitares et claviers s’en donnent ici à cœur joie, supportés, portés par une batterie proposant une alternance légèreté/impact réjouissante. Le titre d’ouverture, Pour de vrai, se pare de quelques bidouilles électroniques, des zigouigouis qui lui donnent une teinte post moderne sympathique. La voix, posée sans effets putassiers, dégage elle aussi un aspect acoustique, comme elle pourrait être chantée a capela. Il arrive qu’un effet « téléphone » ou qu’une légère distorsion lui soit octroyé pour lui donner un charme rétro qui permet de relancer la sauce dans une dernière ligne droite pleine d’intensité.
Les trois autres titres (La Lagune/ La Baïne, Siempre la pena et Grole Petrole), tout autant séduisants, reprennent les mêmes ingrédients, mais selon un autre agencement, ce qui permet de voir tout le potentiel de ce groupe diablement intéressant. Un gros bon point à noter concernant la qualité des textes. À la fois poétiques, dégageant parfois un parfum de surréalisme, ou alors plus proche d’une réalité proche du bitume, Karaboudjan séduit par son feeling sensible et écorché. Une très belle découverte et un immense espoir « rock » que nous suivrons dans ces prochaines évolutions.