ANNA MARIA CELLI Izaurinda

Izaurinda Anna Marie Celli

Aux éditions l’Orpailleur (déjà disponible)

Un immigré clandestin tente de survivre dans un Paris déshumanisé, et à son passé qui ne cesse de le hanter. Descente en enfer, mélancolie d’un passé révolu et de l’amour d’Izaurinda qu’il a quitté pour le meilleur qui s’avère être le pire, Sem se heurte à un monde qu’il ne comprend que trop bien, s’adapte et se perd, dans la violence et la perte de soi.

C’est en quittant un pays de sable pour un pays de béton et d’asphalte que Sem trouve le spleen, la mélancolie et surtout la misère qu’il croyait laisser derrière lui. On sait toujours ce qu’on quitte, jamais ce que l’on trouve et cet antihéros l’exprime de la meilleure des manières possible à travers la plume poétique mais d’une rare acuité d’Anna Maria Celli. Elle décrit en peu de mots extrêmement précis et bien choisis ce que l’humain porte de plus noir et triste au fond de lui.

Elle nous raconte une histoire de paumé parsemée d’éclairs de bonté et de lucidité. Il est en effet dur de ne pas se prendre d’affection pour cet homme bien trop intelligent qui malheureusement devient ce que tous ses actes lui intiment de devenir.

Le destin n’est pas tendre.

Ainsi, il se tourne et se retourne vers son passé, à travers l’oasis d’amour qu’est Izaurinda, cette femme qu’il a laissée au pays,, pour ne pas perdre totalement pied. Il est parti car c’est simplement ce que font tous les hommes de chez lui, partir pour tenter de vivre une vie meilleure. Les femmes, restent dans leur pays au sable mouvant, au vent, à l’eau qui manque, à s’occuper des enfants qui, s’ils sont garçons, partiront eux aussi à jour, les laissant indéfiniment dans l’attente du retour de leur(s) homme(s).

Ces moments du roman sont d’une rare beauté, aride mais sincère, vraie. Ils tranchent littéralement avec ce lieu dit civilisé qu’est Paris, un Paris désincarné, sans âme, où Sem perd la sienne à chaque pas qui le pousse vers sa fin. Pourtant, au moment d’une improbable rencontre, d’un mouvement du cœur, nous sentons que tout peut changer, pour le mieux Alors, étrangement, le palpitant de Sem résonne, éveille le meilleur de lui qui se cachait derrière la brute qu’il devenait simplement pour survivre.

Se jouer des attentes.

Les scrupules, il n’en a que faire, pourtant cette rencontre va tout changer. Hélas, si elle va rebattre les cartes, elle le fera d’une façon que nul n’espère, ni lui, ni nous. Anna Maria Celli nous prend à revers, joue avec nos émotions pour faire ressortir la vérité de ce que chacun de nous enfouit au fond de son être. Rêves brisés, manque d’espoir, à quoi se raccrocher alors ? À la pureté, à un petit quelque chose d’insignifiant qui veut pourtant tout dire. Qui montre que chacun de nous à le pouvoir de faire rayonner le meilleur de lui.

La vie n’est pas juste. Elle ne fait pas de cadeau. Mais la rédemption existe, et c’est peut-être cela qui nous reste une fois la dernière page tournée. Ça et ce petit goût d’amertume, même si nous savons que ce roman montre aussi que chaque pas que nous faisons constitue à dessiner l’être que nous sommes appelés à devenir. Il devient donc important de ne pas faire le choix de la facilité, mais celui qui entre en résonance avec notre moi profond. De la sorte, tout le monde sera sauvé.

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