SACHA BERNARDSON, Make it real, sensible sensualité.
Mini album déjà disponible.
La première sensation qui nous entoure, à l’écoute de Make it real, c’est celle d’être en présence d’une œuvre de douceur. Mais pas n’importe quelle douceur, une douceur mouvante, une douceur liquide, qui coule sur nous, autour de nous, en nous, sans nous asphyxier, sans que l’impression de manquer d’air ne se fasse ressentir. Ce liquide est chaud, épais, et dépose sur nos peaux une fine pellicule qui empêche toute impureté de s’y déposer. Cette pellicule fait office de filtre aux mauvaises sensations, de protection face aux agressions extérieures.
Make it real est en effet un endroit où il fait bon vivre. Un endroit où nous cherchons à nous réfugier, sans qu’il s’agisse pour autant d’un endroit totalement familier. Parce que la musique qui en émane est aventureuse, inédite. Bien que nous nous attachions à certains de ses éléments comme points de connexion, de comparaison (et pour nous ils prennent le nom de Bjork, période Medula ou Vespertine), Sacha Bernardson avec ce projet nous emmène au-delà de ce que nous connaissons, de ce qui peut nous apparaître évident à la première écoute.
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Tout commence par une pochette.
Et elle est belle cette pochette. Elle oriente nos sensations, nos plaisirs, délivre un premier secret (mal gardé car il saute aux yeux, mais ce n’est pas grave, bien au contraire). Le liquide recouvre le visage, fixe le tout dans un tableau légèrement surréaliste. Dès les premières notes de Make it real, nous retrouvons cette sensation aqueuse, qui nous aborde sans agressivité. Des notes douces, des tempos lents, un univers électro et pop, expérimental, des orchestrations peu banales y contribuent grandement.
Même si nous restons dans l’univers de la pop, les choix artistiques de Sacha Bernardson nous éloignent de tout le bourbier mainstream actuel d’une pop qui n’est que divertissement, consommable. Make it real n’est rien de tout cela, il nous prend par la main, nous entraîne à l’écart du groupe, nous isole un temps pour nous glisser au creux de l’oreille ses secrets, ses joies, ses peines, ses frivolités, ses importances.
Sa voix nous accompagne. À peine plus forte qu’un souffle, elle délivre une force tendre, une aura de douceur, un souffle qui nous baigne d’une clarté multicolore. Reposant sur des notes suspendues de piano, de rythmiques et autres programmations en ponctuation, de flûte, de harpe, l’album offre une vision unique de l’amour, de la vulnérabilité et de la sexualité.
Loin des préjugés.
Si certains albums traitent déjà ces thèmes, de façon plus ou moins directe ou racoleuse, de manière plus ou moins réussie, Make it real le fait de façon très personnelle. C’est d’ores et déjà un bon point, car nous ne sentons pas un artiste qui forcerait le passage. Plutôt que de venir à nous sans finesse, il nous hameçonne par la curiosité. C’est elle qui nous conduit à plonger plus avant dans l’EP, à tenter d’en percer les moindres recoins. Intelligemment, Sacha Bernardson sait être à la fois assez présent pour que nous ne quittions pas l’écoute de l’album, jamais trop pour devenir pesant.
Il agit un peu comme un guide qui nous indiquerait la particularité à côté de laquelle il ne faut pas passer. Bien souvent, il s’agit de tessitures mystérieuses qui nous obligent à forcer l’écoute, à nous concentrer sur ce qu’elles veulent signifier. Pourquoi ce tissu d’émotions nous submerge-t-il ? Sans doute parce qu’il active un souvenir quelconque, un moment charnel, un moment tactile, un moment d’oubli aussi.
Physique.
Tout cela est physique, dans les deux sens du terme. Physique du corps physique des sciences. Cet aspect ressort par ce jeu des sens. On pourrait presque toucher des doigts cette matière inconnue, celle des rythmiques formant un matelas cotonneux et semblable à un trampoline sur lequel rebondissent des notes, comme au hasard. Or le hasard n’existe pas, donc ces notes viennent se ficher là où elles doivent le faire, déclenchant le premier domino d’une série qui conduit à un sentiment de plénitude, sphérique à 360°.
Et donc le physique du corps qui nous implique, nous électrise, nous attise, sans pour autant le faire de façon évidente/criante, mais plutôt souterraine, sous-marine, en jouant avec ce que nous masquons d’habitude mais qu’avec pertinence l’artiste parvient à dénicher. Il y a cette vérité qui s’exacerbe, presque toute seule, après qu’un déclencheur l’ait allumé.
Ce disque n’est pas anecdotique. Il fait sens. Il articule des réflexions, nous pousse à nous plonger en nous comme dans cette bulle protectrice, liquide, pour ne pas dire amniotique. Parce que justement, peut-être est-ce cela qu’évoque chez nous Make it real, la matrice originelle qui ouvre sur la vie, parce que cette sensation de sons « étouffées », diffractés, inédits mais familiers, nous habite depuis toujours. Sensible, l’oeuvre, qui se décompose en plusieurs étapes*, ne manque pas de nous transporter là où aucune autre ne l’avait jamais fait.
*cet EP est le deuxième autour de l’album Metaverse. Un troisième devrait voir le jour bientôt, ainsi qu’un remix de l’album, d’une série de podcast, le tout conduisant vers un nouvel album.
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On pense à Pikku[ ALBUM ] PIKKU, 5,3,2,1 voyage pour le pays imaginaire