BANDIT VOYAGE, Amour sur le disque (1 & 2)
Deux EP (disponible chez Entreprise)
L’un des EP est sorti en juin, l’autre fin octobre. Réunis, ils forment un LP cohérent, qui ne manque pas de nous séduire par ses aspects DIY, punk dans l’âme, légèrement lofi, mais diablement addictif. Il faut dire que Bandit Voyage, c’est déjà une voix qui ne manque pas de tout ravager autour d’elle, et une évidence mélodique et instrumentale qui laisse tout sauf indifférent. Le diptyque Amour sur le disque le prouve de façon fracassante.
Bandit voyage, c’est un duo composé de Robin Girod (basse) et d’Anessa Cadeli (voix, accessoirement sœur de Flèche Love, qu’on aime aussi beaucoup). Si Amour sur le disque (1) était leur premier EP, le duo avait déjà pas mal tourné, notamment avec les Rita Mitsouko (tiens donc, est-ce réellement une surprise étant donné le chant très personnel d’Anessa n’étant pas sans rappeler celui, plein de liberté, de Catherine Ringer).
Le duo, explosif, balaye plusieurs styles avec la même insolente réussite. Décryptage.
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Donner de l’amour.
Amour sur le disque, c’est déjà une promesse, celle de nous offrir du bon temps, de nous donner du plaisir. Et c’est indéniablement ce que fait ce groupe « pop », en mariant à merveille les genres. Pop, donc, pour l’évidence qui découle de leurs compositions, effet orientaux (sur Ma mère par exemple), punk (le chant scandé, théâtral, hyper personnel), rock (les instrumentations), le melting pot est à la fois osé et évident, preuve qu’il colle à la peau des deux compagnons.
Les lignes de basse sont autant expressives qu’efficaces, ce qui n’est parfois pas toujours le cas lorsqu’il s’agit d’un duo (qui opte pour le presque tout synthé). Ici, nous comprenons aisément pourquoi celle-ci fonctionne à plein régime, et ça fait du bien. Pour le reste, les instrumentations empruntent à l’électro, avec parfois de l’autothune sur la voix, quelques rythmiques et ou programmation étant également de la partie, au rock (l’électricité des guitares), en passant par une certaine idée du disco (avec quelques touches de « saxophone »).
Pourtant, tout reste dans le giron de la pop, par ce foisonnement d’idées, à la fois rythmiques et mélodiques, ce côté immédiatement assimilable, qui ne cache pas des paroles qui peuvent s’avérer d’une implacable justesse. De la même manière, nous avons l’impression d’une constante progression des morceaux, ressemblant à s’y méprendre à une recherche de soi, même si l’esthétique démontre globalement le contraire en invitant plutôt à la « bamboche ».
Deux fois dix titres.
Les deux EP contiennent 5 titres chacun. Nous y retrouvons donc ce mélange de style, le tout étant porté par un chant en français, évident et percutant. Les paroles sont des vignettes de la vie quotidienne, des constats que l’on a tous pu faire un jour ou l’autre (et des fois à jeun ou d’autres complètement bourrés). Néanmoins, il y a une part non feinte d’intimité dévoilée, qu’il convient de reconstituer comme l’enquêteur remonte le fil de sa piste.. Le propos n’est jamais creux, ressemble à s’y méprendre à des histoires de vie, pris du côté de la rigolade, mais jamais de mauvais goût.
Si la part d’intimité existe, elle est parfois rejetée loin derrière l’aspect festif (le très club Amour sur le beat). Mais un disque trop sérieux, ça ne sert à rien, ou du moins pas à grand-chose, ainsi l’alternance lâcher prise/constat « métaphysique » de l’observateur s’avère payant. On aime le côté décalé, le côté parlé (Ces choses-là) qui vient contraster avec le soin apporté aux lignes de chant.
Cela casse un peu la dynamique, ramène un sentiment concret sur le devant de la scène, avec pas mal de réussite. Même si les tempos varient, l’ensemble des disques est très dansant, propose un groove efficace, jamais racoleur, ce qui ne manque pas de toucher sa cible.
Entre rire et sensibilité.
Nous trouvons à la fois de la légèreté et de la gravité dans ce disque, sans que jamais celle-ci ne vire à la sinistrose. Les émotions déployées ici sont plutôt variées, entre joie et légère nostalgie, presque « de bonne foi ». La sincérité pleut, reste toujours braquée sur le soleil au beau fixe. On se prend parfois à sourire, parfois à ressentir un petit pincement au cœur en nous remémorant des mots (ceux de la mère) ou des situations. Mais loin de plomber l’ambiance, cela lui donne un caractère concret, de proximité.
C’est un peu comme si les artistes s’adressaient à nous, comme de bons vieux potes avec qui délirer. Cela n’a évidemment rien de péjoratif, bien au contraire, puisque cette notion dégage de belles images de solidarité, d’amitié, d’amour (même si celui-ci peut parfois être un peu vache). Le LP formé par les deux volets d’Amour sur le disque s’adresse donc à ceux qui voient le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide, et cette idée optimiste rayonne avec la musique de Bandit Voyage, ce qui ne peut, au fond, que faire un grand bien !