GILLES PARIS, Un baiser qui palpite là, comme une petite bête.

un baiser qui palpiteRoman paru chez Gallimard Jeunesse.

Ce livre a beaucoup être publié chez Gallimard jeunesse, son propos est suffisamment adulte pour que tout le monde s’y retrouve. En effet, dans ce roman qui nous parle d’ados, qui leur parlera aussi forcément, Gilles Paris nous décrit une jeunesse qui en a marre d’être prise pour ce qu’elle n’est pas. Premiers émois amoureux, découverte des fêtes, de l’alcool, de la drogue, du sexe, Un baiser qui palpite là, comme une petite bête ( tiré d’un vers Rimbaud), tout y est passé au crible, avec lucidité.

Nous suivons une bande de copains suite à la mort tragique d’une de leurs camarades. En effet, Iris s’est suicidée, suite à un harcèlement scolaire. Cet événement a marqué les esprits, pourtant toute cette petite bande continue à vivre, se dédouanant pour certains, culpabilisant pour d’autres. Mais tout n’est pas si simple.

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Un premier chapitre coup de poing.

(Nous ne spoilons pas la suite, tout ceci survient dans les 13 premières pages du livre).

Le premier chapitre est un vrai choc. Nous sommes en présence d’Iris, cette jeune femme d’à peine 17 ans qui vit un harcèlement scolaire des plus violents. Il faut dire qu’elle couche avec n’importe qui, se réfugie dans le sexe dans l’espoir d’y trouver l’amour, et surtout un moyen de se pardonner. De quoi est-elle fautive ? De rien. Enfin si, de s’être fait violer par son beau-père, d’en avoir parlé à sa mère et d’avoir reçu une gifle de la part de celle-ci en guise de réponse.

On voit alors Iris acheter une corde, la passer au-dessus de la poutre dans sa chambre, et de s’y prendre. Violent. Terriblement juste aussi. Et c’est cette justesse, mise en avant dans tout le roman, qui en fait un livre important.

Justesse.

Gilles Paris n’est plus adolescent, pourtant il se glisse dans leur peau à merveille. Il décrit un peu leur vie, même si tout reste romanesque, avec une lucidité bienvenue. Les ados ne sont plus des enfants, se croient déjà adultes, même s’ils sont assez matures pour comprendre qu’ils ne le sont pas totalement, notamment lorsqu’il doivent s’acheter de quoi tiser. On suit les jumeaux Emma et Tom, l’amoureux de l’une, Solal, ses amies Sarah et Chloé, les amis de l’autre Gaspard, Timothée, Aaron, plus quelques autres.

Tous ont droit au moins à un chapitre pour s’exprimer, dire comment ils voient la vie, les amis, les petits amis (ou petites amies). Tous ont des points de vue différents, mais tous s’expriment ou pensent à peu près comme des adultes, même si leurs préoccupations ne sont pas de l’ordre des responsabilités (ce qui les arrange bien). Mais tous, suite à la mort tragique d’Iris, ont des réflexions très matures, quant au rôle qui fut le leur avant que ne survienne l’irréparable.

La vie la fête les excès.

Une grosse partie du roman gravite autour de la notion de la liberté qui s’offre à ces jeunes gens, par encore adulte, mais sur le point de le devenir. Ils découvrent l’alcool, la drogue, découvrent aussi leur sexualité, avec tous les dérapages que cela peut créer. Bitures monumentales, réputations qui se font et se défont en un mms, tout y est passé au crible, sans franchir la barrière du too much (sauf peut-être à une exception, qui ne concerne pas directement les fameux ados en question, mais démontrant tout de même d’une solidarité qui fait bloc (chose que l’on en retrouve plus chez les adultes soit dit en passant).

L’ensemble est très cohérent, très bien écrit (le bouquin fait 213 pages et se lit en 2h), avec une intrigue solide qui fait que nous ne nous désolidarisons du livre qu’une fois celui-ci terminé. Si l’on excepte la formule « nous les ados » qui revient à quelques reprises et qui manque, à notre goût, d’un peu de réalisme, ou du moins qui montre que ce n’est pas un ado qui s’exprime, tout est absolument limpide dans ce récit.

Romantisme, croyance que tout ira toujours bien.

Ce roman est romantique, dans les bons et les « mauvais » aspect de celui-ci. Notamment lorsque l’amour s’invite à la fête, nous croyons que jamais il ne s’en délogera. Mais lorsque c’est le cas, la détresse la plus sombre vient vous cueillir, vous faire mal. Avec tact, Gilles Paris parvient à traiter tout cela en restant avec pour objectif d’être au plus près de la vérité (en procédant ainsi, il ne s’éloigne jamais de son sujet, évite la dérive pour rester focalisé sur la progression de son intrigue).

C’est pour cela qu’Un baiser qui palpite là, comme une petite bête fonctionne si bien, parce qu’il est plein de tendresse, mais aussi critique d’une jeunesse qui veut griller les étapes, comme l’impose la société dans laquelle nous vivons. Et cette société est violente, y compris pour les jeunes. Elle rôde toujours non loin, la violence, malgré la désinvolture adolescente que saupoudre l’auteur au fil de son roman. Tant mieux, cette juste mesure fait que jamais l’ouvrage ne tombe dans le cliché, celui qu’il est si facile de coller sur la tête des ados.

Bref, que vous ayez 15-16 ans ou 40, ce livre mérite d’être lu, pour éviter, dans un cas comme dans l’autre, de produire des clichés à la chaine. Divertissant, mais surtout crédible, Un baiser qui palpite là, comme une petit bête est un roman utile.

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