DOWNTOWN NEW YORK, underground 1958/1976

L’histoire de l’underground New Yorkais vu par Kembrew Mcleod.

Attention ! Ce bouquin est une pépite , une mine d’informations à pages ouvertes, une bible pour quiconque s’intéresse un peu à l’émergence de toute une scène qui, aujourd’hui, malheureusement, s’est éteinte. Downtown New York, Underground 1958/1976, activistes pop, cinéma indé, freaks gays & punk rockers (aux éditions rivages rouge) revient sur vingt années de créativité débordante et sans frontières.

Nous n’allons pas vous faire un name dropping insupportable, néanmoins, quelques noms reviennent fréquemment dans ce bouquin, des pivots, des mentors, des créateurs qui ont osé absorber la culture mainstream pour créer leur propre tambouille. Nous citerons, pour le théâtre, Harry Koutoukas, Ellen Stewart (mais il y en a tant d’autres…), pour la musique Richard Hell, Blondie, pour l’art visuel Andy Warhol, forcément. Des peintres aussi, des vidéastes, des acteurs, des homos, des drag queens, des lieux miteux devenant emblématiques… Secouez le tout et vous obtenez le Downtown New York, quartier de toutes les expérimentations (et pas qu’artistiques).

Un quartier dangereux.

New York, downtown (en opposition à l’Uptown New York, quartier huppé) n’était pas un quartier où il faisait bon se promener. Passées certaines rues, vous y risquiez carrément votre peau. Néanmoins, les loyers n’y étaient pas élevés et permettaient à de nombreux artistes, souvent mis à la porte de chez eux pour cause de sexualité jugée alors déviante, de trouver un toit à se mettre au-dessus de la tête. Il régnait là-bas un fort esprit d’entraide et surtout une volonté de mettre les arts au premier plan. Le Caffé Cino, le La Mama, le Max’s Kansas city, le CBGB, autant de lieux emblématiques (n’existant plus en tant que tel aujourd’hui) où les artistes pouvaient se produire, exprimer leurs envies, leur art, sans être jugés de façon péremptoire.

Enfin, nous disons cela, mais ce n’est pas tout à fait exact puisque certains spectacles étaient interdits faute à une censure puritaine encore plus présente qu’aujourd’hui. Malgré tout, bon gré mal gré, tout le monde se retrouvait, mélangeait ses idées (et parfois leur fluide) et formait un vivier d’idées géniales, subversives, provocatrices, déconnantes dans une sorte de bonne humeur ambiante (que la drogue, absorbée parfois en quantité industrielle, vint quelque peu ternir).

Pas de frontière, pas de censure.

Les artistes présents s’autorisaient toutes les facéties (ré)créatives, tous les écarts de conduite pour promouvoir leur art. Parfois, des clashs, plus ou moins sérieux, advenaient (Andy Warhol se faisant tirer dessus, par exemple, parmi les plus retentissants), mais chacun continuait à essayer de tirer son épingle du jeu, parvenant à faire venir à eux un public non seulement d’initiés mais également plus mainstream. Le Donwtown New York, qui rayonnait notamment par la théâtre (baptisé Off Off Brodway), commença son expansion, ralliant à sa cause quelques critiques et médias.

Mais surtout, ce qui était sa marque de fabrique, c’était sa tolérance absolue entre les freaks, les homos, les drag queens, les straight (les hétéros quoi), le punk et le disco. Tout le monde gravitait autour de ça, dans une paix relative, tant que les expérimentations artistiques pouvaient se dérouler sans entraves. Malheureusement, au début des années 80, le New York underground disparu.

La fin d’une époque.

Cette fin intervient par un désir de la ville de réhabiliter le glamour des bâtiments d’alors (et de se débarrasser aussi de cette faune parfois gênante. Elle lança donc de vastes chantiers de remise à neuf et la bulle immobilière, avec des personnages comme Donald Trump aux commandes, prit son essor, entraînant avec elle une hausse des loyers, chassant les artistes vers d’autres lieux. Et puis, l’épidémie de SIDA commença à faire des ravages parmi la population gay. Toute la folie des lieux pris fin, pour une uniformisation hélas commune, aujourd’hui, à presque tous les pays.

Pourtant, si nous y regardons de plus près, ce livre pourrait être une source d’inspiration pour tous les artistes d’aujourd’hui, mis à l’arrêt par l’épidémie de covid. En effet, en se regroupant à l’époque, les différents métiers des arts parvinrent à exister, à acquérir des lettres de noblesses leur permettant d’exploser pas mal de codes et surtout à devenir une façon d’entrevoir les arts, un peu partout sur la planète. La culture underground s’y est émancipée, devenant souvent un modèle à suivre.

Alors que tout est à l’arrêt, et que la machine sera probablement dure à relancer, il convient de s’interroger sur les nouvelles formes artistiques qui prendront le relai, en décloisonnant, s’il est encore possible, les styles. Et surtout de continuer à développer cette tolérance qui semble revenir en arrière depuis quelque temps. Ce bouquin est une petite merveille du genre, même s’il faut un certain temps pour le lire tant les informations y sont denses et interconnectées. Mais il est évident que nous en ressortons plein d’espoir quant à ce qu’il est encore possible de faire.
downtown new york kembrew mcleod

 

Un autre ouvrage dans la collection Rivages rouge ? Dans l’ombre des Beatles par Derek Taylor

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