SONS, les fils idéaux ?
Sweet boy, déjà disponible [PIAS]
Et si le groupe anglais de l’année était… belge. On revient, avec un long métro de retard, sur le deuxième album de Sons, Sweet boy, parce que, simplement, jamais post punk n’a été aussi virulent et excitant.
Tout commence par un son imposant. Pas de place à la respiration, c’est une déferlante qui nous percute de plein fouet. Ici, l’âpreté revêt des atours séduisants, ceux de mélodies qui accrochent l’oreille dès les premières mesures de Succeed. Prémonitoire, ce titre ? Assurément. Il met à la fois le feu aux poudres et nous dit que ce groupe-là, qui signe ici son deuxième long format après Family Dinner paru en 2019, en a sous la semelle.
Certes, on reste dans l’énergie, dans un sentiment d’urgence, dans une noirceur de laquelle ne s’extirpe a priori aucun espoir. Cette musique, en somme, est volcanique et quand elle entre en éruption, elle ne laisse d’autres choix que de l’adopter totalement. Alors, on se laisse bercer (enfin, façon de parler) par Sweet Boy (la chanson qui donne son nom à l’album), Hot Friday et son martèlement furax de fûts, mais aussi de frottage vénère et toxique de cordes. Même L.O.V.E n’a rien d’une love song puisque son entame « sirènes de pompier », annonçant un désastre imminent, nous cloue au plancher.
Une présence charismatique et ultra présente.
Si les instruments sont cinglants, le travail sur les voix est au diapason. L’expression est directe, froide, rehaussée d’effets (échos, disto, réverb) et ressemble à un uppercut reçu à la base du menton. Mais, plutôt que de la jouer sans nuance, le groupe opte pour le relief. Parfois plus posé (comme sur Momentary Bliss par exemple), osant l’économie d’effets, Sons séduit par un vrai talent dans ses compositions et ses arrangements. Impossible de savoir, avec cette qualité mélodique, que le groupe n’est pas britannique. Les gonzes ont en effet tout compris et proposent une musique à même de transcender les frontières, et par la même occasion de s’imposer un peu partout sur le globe.
Car oui, leur style n’est pas un post punk bas du front. Il oscille entre colère viscérale, déviances sonores (légèrement expérimentales parfois), rock sans âge (on pense à un groupe comme The Heavy) et moments plus orientés heavy rock, voire presque métal (I don’t want you et surtout Pixelated Air) mais toujours à deux doigts de flirter avec le punk d’autant (les « Bike », sur le titre du même nom sont du plus bel effet oï).
Bref, il y en a pour tous les goûts, si tant est que vous aimiez la musique qui vous sort du pieu à grands coups de pied dans le derche. Inutile de préciser que nous apprécions l’effort des belges pour nous dynamiser à tout instant de la journée.
Un bon grand disque comme on les aime, fait par des fils qui, s’ils ne sont pas idéaux, ont quand même de quoi rendre leurs parents sacrément fiers.
Patrick Béguinel