PATRICK AUFFRET, Drug party in the 80’s

drug party in the 80's Patrick Auffret

Les éditions des joyeux pendus

Chroniqueur musical, photographe, passionné de cinéma, Patrick Auffret, qui fut un temps chroniqueur sur Litzic, publie son premier roman, Drug Party in the 80’s. D’ailleurs, il ne s’agit pas véritablement d’un roman, mais plutôt d’une autofiction revenant, avec la sagesse des années, sur un parcours chaotique au sortir de l’enfance.

Ah ! L’adolescence ! Cette période ou nous nous prenons pour plus grands que nous sommes, remettant en question les dogmes parentaux, voire ceux de toute forme d’autorité, et époque bénie des toutes premières fois (du moins de celles décidées de notre plein gré). Bref, un joyeux bazar durant lequel les émotions et sensations exacerbées contribuent à aller toujours un peu plus loin dans les excès. Avec lucidité, l’auteur nous prend par la main et nous ramène dans les années 80, période ou naquit le mouvement post punk et ou les expérimentations se firent folles pour lui.

Une plume erratique.

Pour mieux rendre compte du foisonnement émotionnel et des stimuli qui l’envahirent à cette période, l’auteur use des répétitions avec merveille. Plus précisément, il ne s’agit pas véritablement de répétitions au sens strict du terme, mais plus exactement de l’amplification d’un moment vécu. Un peu comme s’il rabâchait le cadre qui était le sien à cette période, Patrick Auffret montre déjà que la fumette perturbe sa pensée. Ainsi, l’ado qu’il était, tiraillé entre sa condition nouvelle de dealer et de consommateur et celle du lycéen espérant obtenir le précieux sésame qu’est le baccalauréat, nous expose avec une certaine sensibilité ses émois d’alors.

Oui, fumer était génial. Devenu rapidement accroc, il s’entoure d’une joyeuse bande avec qui il vivra ces moments forts qui restent gravés dans la mémoire. Tout pourrait se résumer en un mot : liberté. Ce sentiment pleut des pages du bouquin, renforcé par l’amour de la musique, du cinéma, et de la gent féminine. L’ensemble s’avère grandement attachant, nous replonge avec délice dans notre propre fin d’enfance, que celle-ci ait eu lieu dans la même décennie ou pas. Universel, son livre touche nos cordes sensibles et nous rappelle que, oui, nous vieillissons et nous prenons de la bouteille (et aussi un peu de plomb dans la tête).

Une descente.

Plus que d’évoquer les états de défonce et les sensations qu’ils procurent, l’auteur ne fait que survoler ce fait, pour se pencher plus précisément sur les interactions sociales qui étaient les siennes à l’époque. Dur de ne pas ressentir un petit pincement au cœur lorsqu’il évoque les actes manqués, notamment auprès de son père, quand il évoque son échec au bac alors qu’il était plutôt bon élève. La drogue, c’est un fait, détruit, qu’elle soit douce ou dure (et qu’il s’agisse d’alcool ou de cannabis, le constat est le même).

Nullement il n’est fait l’apologie d’une quelconque substance. Jamais l’auteur n’incite à tester l’ expérience de la drogue. Il relate juste ce que cela lui permis d’accomplir à un moment donné de son existence. Et aussi ce que cette consommation excessive lui a couté. Si une pointe d’amertume se disperse au fil des pages, nous ne sentons pas non plus un désespoir poindre. A la différence de certains ouvrages lus (et qui furent notamment publié chez l’excellente et défunte maison d’édition 13e note éditions), la drogue n’est pas magnifiée ni glorifiée. Elle est juste un élément de la vie de l’auteur qui l’aura conduit à la dépression.

Un bon travail.

Les éditions des joyeux pendus offrent à lire un ouvrage touchant, nostalgique, (presque) éclairé, lucide, joyeux mais aussi un peu triste, bref un ouvrage qui ressemble à la vie.

Cette première autofiction de Patrick Auffret nous laisse imaginer une suite possible. On espère que ce sera le cas car jamais notre voyeurisme (ou exhibitionnisme de l’auteur) ne sont conviés. Nous y voyons plutôt un échange autour d’un moment clé de l’existence que l’auteur veut partager avec nous, en toute humilité. Et ça change pas mal de chose !

Patrick BEGUINEL

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