Report Route du rock 17é édition hivernale

Attaché à la route du Rock

Le titre d’un report est l’entame d’une histoire. Parfois mystérieux, parfois mal adapté mais généralement dévoilé en cours de lecture. Mon attachement personnel au festival Malouin (soufflant sa 17é édition hivernale) conditionne celui-ci mais trouve aussi son inspiration dans un détail sol-air ultérieurement dévoilé.

C’est traditionnellement par un point météo que je positionne l’entame des évènements. C’est donc en ce vendredi 10 mars que je file vers la Nouvelle Vague de Saint Malo par une forte houle et un vilain temps pluvieux, malheureusement de saison. C’est de bon augure pour la version estivale qui, priorité des tongs oblige, se doit d’être vécu au sec. Il faut croire que la route est vite avalée, car c’est 30 minutes avant l’ouverture des portes que je me présente avec un petit groupe de fidèles et m’apprête à présenter le ticket sésame.

Nous sommes immédiatement refoulés par la sécu, qui fera là son travail pédagogique, en replaçant ses premiers visiteurs un peu trop pressés derrière la cordelette rouge de « début de queue ». Malin que je suis, c’est à l’abri sous la corniche du bâtiment que j’observe le bal des grincheux (mais pas que) et la disponibilité de places à vendre. Un bilan de fréquentation évoqué avec la direction, qui me confortera sur le taux de remplissage final de l’évènement. Nous ne sommes pas en sucre ! et moi j’apprécie cette première attente qui permet de parler aux spectateurs encore disponibles et de fantasmer sur la programmation et la future galette saucisse.

Ouverture des portes

19h45, ouverture des portes et c’est parti pour la 17éme édition de la version hiver de la Route du Rock à St Malo. Le festival lui avait déjà débuté le mardi à Rennes (voir chronique précédente) et pouvait déjà se féliciter de l’excellente affiche du jeudi à l’Antipode et d’un début de mission réussie en antidote au spleen de fin d’hiver.

Il pleut suffisamment à l’extérieur pour attaquer en intérieur une version Rock Sec avec Nathan Roche, l’Australien protégé du label Born Bad Records. Démarrage en trombe avec le 1er titre de son nouvel album « Break Away » où la rythmique batterie basse prend le devant de la scène pendant que le Franco Australien se tient dans son coin. Son charismatique guitariste est lui positionné au centre de celle-ci, sous les feux de la rampe, arborant un élégant pantalon bleu à rayures et un tee- shirt seyant. Les rockeurs de 35 ans pour les meilleurs n’étant encore qu’en début de carrière, ils se doivent de garder la ligne !

17é édition hivernale

Le timbre de voix attendu entre Nick Cave & Lou Reed est là, mais le chanteur n’en est pas encore à arpenter la scène sauvagement. Le set se partage les titres de son dernier album et des deux précédents et sonne bon le désert australien. L’aridité en moins pour les premiers consommateurs de bière. Nathan souhaite au public une très belle soirée qui devrait se poursuivre toute la nuit. Il conte ses expériences personnelles, évoque les plus grandes heures du label Fire Records (The Stevens) ou d’un Lou Reed du milieu des années 70 (Tristan Winston Price). Il étale en chanson sa culture musicale, héritée d’un passé de disquaire australien et termine son set en puissance et en déhanchés, prouvant une nouvelle fois que seul un âge encore tendre peut permettre ses coups de pieds tranchants comme un bon riff de guitares.

Forever Pavot.

Les chroniqueurs de plus de 50 ans, ayant définitivement o,u presque, renoncés à redresser la jambe à 90 degrés, il est temps de prendre la direction du bar et du food truck «galette saucisse ». Le merchandising de la Route du Rock est toujours sympa et sent bon l’été. Tote-bag en main, me voilà reparti dans le jardin musical prêt à écouter, avec curiosité, le second groupe de la soirée Forever Pavot.

Derrière ce nom de scène se cache Emile Sornin, explorateur des genres et des influences allant de la chanson expérimentale à la pop psychédélique. Il revient aujourd’hui avec l’album « l’Idiophone », une musique qui révèle déjà en écoute « canapé » une imagination et un talent d’écriture qui va témoigner en « live » une maitrise musicale et une très belle orchestration piano, guitare, batterie.

La moustache du bonhomme est accompagnée de favoris et révèle une personnalité touchante et une audace stylistique. L’univers de Forever Pavot est riche et son imaginaire parait sans limites entre ambiance « musique de film » des années 60 et dessin animé de notre enfance. Ajouter à cela une très belle projection vidéo, tableau vivant animé aux couleurs pastelles et vous obtenez le premier véritable coup de cœur de la soirée.

La voix est belle et raisonne entre un Daho un peu plus bavard que d’habitude et un Tellier un peu moins barbu. Les textes sont parfois difficiles à analyser, il faudra les décortiquer à tête reposée. L’élégance d’Emile s’observe aussi dans le placement sur scène où il laisse ses musiciens au centre de la scène eux aussi sous les feux des projecteurs pouvant exprimer ainsi tout leur talent et de beaux solos de guitare. Après le désert australien, une belle fleur rouge est éclose, le pavot étant l’autre nom du coquelicot à ne pas confondre avec son cousin d’orient le pavot à opium (Papaver somniferum).

Après le coup de cœur.

Autre fleur, autre destination : les rives du Bosphore. Un voyage en Turquie avec le groupe Derya Yıldırım & Grup Şimşek, reconnu pour ses interprétations contemporaines de ballades folkloriques. La modernité attendue, n’a pas forcément été entendue mais la prestation du groupe n’a pas pour autant endormi une salle de La Nouvelle Vague attentive aux contes d’orient. L’amour et la paix étaient au rendez-vous.

Derya est tout sourire et brille sous les lumières dans son habit doré. Elle joue du luth, communique en anglais et chante des airs enivrants, mêlant psychédélisme, jazz et pop contemporaine. Elle est accompagnée par ses partenaires le plus souvent à la guitare électrique, synthétiseur et d’une rythmique elle aussi très esthétique, le tout desservant une musique « World » accompagnée ponctuellement de flute traversière.

L’heure de rentrer se faisant ressentir, je délaisserai donc les concerts certainement très bons des groupes Panda Bear et Sonic Boom.

Samedi.

De retour pour cette seconde soirée. C’est d’arrache pied que je me positionne aux avants gardes devant la barrière accréditation photographe. Je ne m’attends pas à un copie-coller de la veille, mais c’est d’une démarche lunaire que j’avance sur le parquet, mes pieds étant littéralement scotchés sur un reste de bière uniformément séchée. Un vrai ragréage à la levure et aux sucres  gage du renouvellement de notre attachement au festival Malouin.

En ce samedi, il nous faut du rythme. C’est donc pied aux planchers et cheveux colorés au vent que le très attachant groupe français TH da Freak démarre cette soirée. Cette formation menée par Thoineau Palis, régulièrement étiquetée « slacker » par la presse, en référence à son évidente obsession pour les guitares décontractées d’un indie rock 90 fantasmé, promène son album « Coyotte » sur la scène de la Nouvelle vague. On retrouve avec cette jeune génération le talent des ainés.

Le mimétisme vestimentaire façon Kurt Cobain transpire. Le bassiste est excellent, une folie dans le regard et un look bien soigné. Il arpente la scène avec un médiator collé fois son front (et à la sueur de celui-ci). 11 titres qui s’enchainent et qui prouvent la progression du groupe vers des mélodies plus maîtrisées. Le set de ce soir met en valeur ce 4ème album et mérite les applaudissements entendus en fin de concert. La moustache étant décidément un signe distinctif des musiciens du moment, permettez-moi de souligner la très belle prestation de celle portée par le guitariste du groupe. Celui-ci se permettra un excellent solo de guitare, cordes en bouche, jouant des dents ou de la dite-moustache. L’instant magique laissera apparaître une écriture au verso de l’instrument « Le Freak c’est chique ». Achetez leur disque, ils le méritent !

Lee Ranaldo

C’est un cador qui se positionne en scène, sur son petit tabouret. Lee Ranaldo (ex guitariste et chanteur de Sonic Youth), revenu des longs riffs New Yorkais pour des ballades plus acoustiques joue l’intimité d’un concert attendu, mettant en vedette la musique de son récent album In Virus Times — une œuvre acoustique entièrement instrumentale, en quatre parties, écrite pendant la pandémie. L’entrée en matière, certes polie et riche de discussion parait un peu longue pour quelqu’un qui ne connait pas l’œuvre.

J’observe une amie, amatrice du chanteur, bercée par la très belle voix de Lee façon Michael Stipe (REM), sourire durant toute la prestation. Il est vrai que l’attention des premiers rangs est captée, signe d’un envoutement progressif. Seuls les cris d’amours d’une autre fan, appréciant ce quasi-tête à tête avec Lee, transpercent le silence religieux qui accompagne les textes et les chants du poète musicien. On entend bien de temps en temps, un sermon venant de l’arrière-scène et demandant aux spectateurs inattentifs et peu respectueux de la fermer !
Indisciplinés.

C’est un peu malheureusement ce que Malik Djoudi, venu nous présenter son nouvel album « Troie » devra subir. La pop Intimiste et sensuelle du Français, insufflée aux oreilles d’un public égaré, ne fait pas mouche immédiatement. Les rockeurs aux cheveux longs et gras se demandant peut-être ce que vient faire ici un chanteur français nominé aux victoires de la musique.

L’électronique et la voix si singulière de Malik aurait dû suffire à attiser leur curiosité et ce n’est pas à la surface d’occupation d’une scène que l’on juge un talent. Les quelques m² empruntés par Malik et son complice Greg Cadu autour de leurs machines étant largement plus présentable que l’univers étriqué des spectateurs récalcitrants. La voix androgyne à la « Christophe » accompagne très bien cette pop électronique et laisse apparaître un « tempérament » généreux et dansant. Regardez bien, elles étaient là ! Les guitares étaient simplement portées dans le dos et utilisée à bon escient.

Arab Strap

Le tempo électronique étant mis en avant, c’est avec le groupe Arab Strap que nous poursuivons cette très belle soirée Il n’est pas besoin de présenter les Écossais, composé d’Aidan Moffat et Malcolm Middleton, la tête d’affiche du week-end. Avec son dernier album « As Days Get Dark », le groupe a puisé dans ses fondements sonores pour s’ouvrir à de nouveaux horizons. Habile mélange de post-rock, de musique électronique subtile, de cordes résonnantes et de la voix mi-chantée et mi-parlée incomparable d’Aidan Moffat.

en concert, il ne s’agissait pas de les rater. Ceux qui avaient eu la chance de les voir en novembre dernier aux festivals les Indisciplinés auront un petit arrière-gout de déjà-vu. Les 7 premiers titres étant joués dans le même ordre qu’à Lorient. Aidan porte toujours le short en jean et la chemise noire. Malcom casquette vissée sur la tête est toujours aussi peu communicatif. L’alchimie fonctionne tout de même. Quelques vieux morceaux quelques trous de mémoire (les lunettes et mémo papier des paroles étant nécessaires) et puis s’en vont sur le titre qui les a révélés « the first Big Week end ». Ça l’a fait !

Fin de soirée.

Une nouvelle fois espérons que ce ne soit pas le dernier beau Week end en leur compagnie et qu’il ne faille pas attendre 10 ans avant de re-écouter un nouvel album des Arab Strap. La sortie le 10 mars dernier de l’album de Lichen Slow réunissant Joel Harries et Malcolm Middleton pouvant expliquer l’air détaché de ce dernier.
( https://litzic.fr/live-report/arab-strap-une-premiere-escale-a-lorient/)

Il était fort à parier que seuls les amateurs de gros sons et les couches tard resteraient écouter les filles (et un garçon) de la Vallée de la mort : Death Valley Girls. Fin d’une soirée made In Californie où, à en croire une photo de Titouan Massé, la chanteuse multi-instrumentiste Bonnie Bloomgarden a su se contorsionner et probablement renverser le public.

Et voilà clap de fin de cette 17ème édition. Le cadet des festivals malouins n’est pas encore majeur, mais il a su porter une nouvelle fois sur ses épaules l’esprit du Rock et de cette musique pas comme les autres qu’on adore. On en redemande toujours plus, promis le sol de la salle de la Nouvelle vague sera lavé, de prochains concerts y seront joués et notre esprit est déjà tourné vers sa grande sœur estivale.
https://www.laroutedurock.com/

Liens utiles :

Nathan Roche Photo https://www.facebook.com/fabriceetloreilleclasse/


Forever Pavot.

Derya Yıldırım & Grup Şimşek

TH da Freak


Lee Ranaldo

Malik Djoudi


Arab Strap


Fabrice et l’Oreille Classée

Depuis mon adolescence j’écoute de la musique. Mes gouts ont évolué au gré de mon acné mais se sont très rapidement orientés vers un Rock plutôt sombre, au premier abord, mais toujours lumineux une fois qu’on a parcouru le chemin de la mélodie. Des CURE aux SMITHS en passant par NEW ORDER, cela vous donne un indice sur mon âge et de mon terrain de jeu de prédilection. Derrière cette coquetterie, se cache une vraie passion.
Depuis toujours : j’ai l’oreille curieuse et tendance à classer les choses. Un TOC ? Non ! une exigence vis-à-vis d’un art majeur et ce d’autant quand il s’exprime en Live.
Fabrice et l’oreille classée est une page musicale que j’ai créé il y a 2 ans. A travers mes chroniques je cherche à faire connaître à un maximum de personnes cette musique, qui me remplit l’esprit et me fortifie le cœur. Je ne suis pas nostalgique d’un passé révolu mais tourné vers le moment présent, avec un œil dans le rétroviseur de temps en temps, tout de même.

Le live est un moment intemporel, il révèle (ou pas) l’artiste.

Je vis l’expérience de la scène généralement après une écoute approfondie des albums du groupe. Maîtriser son sujet, en restant d’abord dans le contrôle et se laisser ensuite balayer par l’émotion individuelle puis collective. De vrais moments de communion que j’aime ressentir et retranscrire en toute humilité dans les live report. Une petite histoire, à l’écoute des spectateurs et au service de la musique. Sérieux le garçon !
Concentré, certes, mais toujours disponible pour parler musique autour d’une bonne bière entre 2 concerts.

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Lire un autre live report de Fabrice : Laura Wild, au Barbe

 

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