BUSTY La scène des baby rockeurs du début des années 2000

busty kids rock chroniqueL’occasion de la sortie de la vidéo de Niki Demiller (ex-brats) ce-jour même (à voir ICI), nous revenons sur une chronique du livre Kids Rock de Busty (journaliste du journal Rock&folk à l’époque) datant de 2010.

Journée banale, déambulations dans les rues de la ville. Une solderie, tiens, il peut s’agir d’un bon plan, parfois des livres à bas coût font partie des arrivages de magasins en faillite ou ayant subi un dégât des eaux ou autres. Bref, dans un des bacs se trouve un bouquin de Busty intitulé Kids Rock, avec cette couverture du plus mauvais effet (un côté fluo cheap, une typo pourrave, des photos de chanteurs copiées/collées kitschs et une citation étrange « on ne se rendait pas compte »), mais bon, ça parle, a priori, de rock. Quatrième de couv’, ça nous revient : mais c’est bien sûr, Busty de Rock&Folk, auteure des Busty Théory (et auteure d’une bio sur Pete Doherty), et les kids rock ce sont ces jeunes rockeurs qui ont fait les choux gras du même journal rock au début des années 2000.

Une scène rock adolescente

Tout d’abord, replaçons les choses dans leur contexte, avec notamment dates et noms. Le mouvement des babys rockeurs est né en 2004, à Paris. Porté par Les Parisians, les Naast, les Brats, Les Plastiscines, cette vague fut relayée (peut-être plus que de rigueur) par Rock&Folk qui y voyait un renouveau rock hexagonal, dans la foulée de celui, Américain, porté par les Strokes et les White Stripes, ou Britannique avec The Libertines. De l’extérieur, nous y voyons comme un problème d’échelle, mais nous sommes en France, on fait avec ce qu’on a à se mettre sous la dent question rock.

Autour des bars « Le Bar 3 », « le Shebeen », la scène se forme, se déforme, se reforme, créant une émulation, une émulsion tellurique (à en croire les rock&folk de l’époque et ce bouquin). Tout le monde s’enthousiasme, signe des contrats, pour qu’au final le soufflet retombe comme une bouse mal digérée. Exit les Naast, les Second Sex et autres Brats. De cette scène, seuls les BB Brunes existent encore (ils ont sorti un album en septembre 2017, mais ils étaient légèrement en retrait de cette fameuse scène des Baby rockeurs), au même titre que les Plastiscines (même si leur dernier effort remonte, déjà, à 2014.)

Emballement puis dénigrement

Pourtant, essayons de prendre un peu de hauteur et de ne pas dénigrer ni cette scène, ni ce journal dirigé par l’inénarrable Phil Man. Bien sûr, ces ados, à l’époque, jouaient de la musique. Nous n’y étions pas, peut-être étaient-ils bons sur scène, peut-être pas, ça, nous n’en savons rien. En recherchant du côté de certains sites musicaux/vidéo, nous constatons néanmoins que ce n’était pas franchement désagréable à écouter (voir très bon dans certains cas), même si la plupart des combos étaient très loin d’illustres aînés rock comme les Noirs Déz et Téléphone. Mais ces « babys rockeurs » étaient insolents, impertinents et surtout jeunes, très jeunes ! Comme beaucoup de jeunes, ils avaient des rêves, des envies, ou même juste une envie de s’exprimer à base de guitares tandis que le rock se relevait d’une décennie, ou presque, bercée par la techno et la French Touch.

Tout de suite, c’est l’emballement de la part de rock n folk. Ben forcément, ils n’avaient rien à grailler du côté de la capitale hormis des groupes installés, et pas franchement transcendant (nous pensons aux disparus Luke ou des trucs du style) ou alors noyé dans un bourbier faute « que c’était pas à la mode le rock dans ces années-là ». Bref, ils se jettent dessus comme des morts de faim, les mettent en une, organisent les rock n’roll friday, vantent leurs mérites, sans conditions, s’attirant les foudres d’autres journaux (dont libération, souvent cités) et générant, paradoxalement, un courant « anti » très virulent. À vouloir aider les groupes, à vouloir les porter en étendard d’une révolution musicale, le journal les a presque desservi.

Fatalité

Ce qui devait arriver arriva. N’oublions pas que nous sommes en France, et, tout bon français que nous sommes, le rock ne figure pas dans l’ADN collectif de notre nation. Résultat ? Dépôt de bilan pour les ¾ de ces groupes après quelques dates (dont certaines en feraient baver plus d’un). Pour ses jeunes gens, il s’agissait sans doute de rêves s’exauçant, et ça, il ne le devait qu’à leur incroyable vitalité (et insouciance), pas à un quelconque journal ou à un quelconque coup de piston de M’sieur Manoeuvre.
Alors que nous faut-il retenir ? Si l’enthousiasme est présent tout au long de ce bouquin plutôt sympathique finalement, le talent littéraire de Busty est un peu limité. Le livre possède quelques beaux atouts, notamment les superbes photos de Marion Ruszniewski, Million Baby, David Aidan et Matthieu Zazo qui arrivent à retransmettre un peu de l’énergie d’alors.

Ensuite, il nous replonge dans un moment d’exaltation. Si le côté « je défends Rock&Folk » est un peu (beaucoup en fait) casse-bonbons, l’amour de la journaliste pour ces groupes corrige un peu l’excès de zèle envers le journal (cela dit, le livre est sorti dans une collection dirigée par Philippe Manoeuvre, ce qui explique sans doute beaucoup de choses). Le reste, ce n’était qu’une énergie rock, une envie de refaire le monde, de se faire plaisir et ça, ça reste plus que louable. De telles initiatives manquent encore cruellement de nos jours, et le futur s’annonce si sombre que nous doutons que cela s’éclaircisse dans les années à venir.

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