SARAH LANCMAN À contretemps

Nous continuons notre exploration de jazz fait en France avec l’album de Sarah Lancman, À Contretemps, sorti il y a de cela quelques mois. Si celui de Thomas Bramerie, Side Stories, que nous avons déjà chroniqué ICI était 100% instrumental, celui de Sarah Lancman fait la part belle à la technique vocale.

La totalité des morceaux reposent sur une assise plutôt traditionnelle jazz, à savoir un trio piano, basse, batterie, à l’exception d’un titre ou un bugle fait son apparition (ses notes cuivrées apportant une touche chaude instantanée et rompant un peu avec les sonorités en place). La production est irréprochable, chaude, enveloppante, comme cela pouvait être le cas sur l’album de Thomas Bramerie.

L’explication provient du fait qu’il s’agisse dans les deux cas de productions Jazz Eleven qui sait véritablement s’y prendre pour vous glisser dans un cocon sans même en avoir l’air (et il faut également noter la belle réalisation du boitier également, sobre et élégante). Nous nous imaginons facilement dans un club à l’épaisse moquette recouvrant le sol, assis dans un confortable fauteuil en cuir… Bref, des images nous traversent la tête, images renforçant l’impact de ses titres en majorité composés par la chanteuse.

Si quelques sonorités sud-américaines se font entendre par moments, plutôt agréables et bienvenues, nous sommes dans un jazz d’inspiration classique. L’ensemble est bien écrit, les instrumentistes se font plaisir, y vont de leur petit solo respectif (disséminé sur l’ensemble des titres, réduisant ainsi l’étalage de technique, bien présente mais discrète), ça swingue plutôt pas mal et est très efficace. Mais ce qui nous intéresse davantage dans le cas de ce À contretemps, ce sont bel et bien les parties vocales.

Sarah Lancman s’y exprime autant en français qu’en anglais, essayant même une incursion en japonnais, en titre bonus, performance très convaincante il faut le reconnaître. Sa voix est chaude, souple comme pourrait l’être une gymnaste, allant des aigus aux graves avec aisance, changeant de rythme avec une déconcertante fluidité, elle ne cesse de nous balader, pour notre plus grand plaisir. Les thèmes abordés sont en relation avec l’amour, qu’il s’agisse de ruptures liées à l’usure, de rencontres, de ce sentiment sans cesse renouveler et qui nous lie à quelqu’un, en bien ou en mal.

Ces thèmes prennent une dimension toute autre lorsque Sarah trouve une réponse dans la voix de Toku, vocaliste jazz japonnais. Si leurs voix s’unissent à merveille, la complicité ressentie entre ces deux artistes est probante. Peut-être ont-ils enregistré les voix séparément ? Si tel est le cas, aucun élément tangible ne permet de l’affirmer tant l’osmose entre les deux est palpable.

Qu’ajouter à cela si ce n’est que ce disque, À Contretemps, porte bien son nom car il est aux antipodes de la musique actuelle, fait de rimes faciles et de musique souvent pauvres. À contretemps d’un mouvement général, certes, mais en phase avec une qualité indémodable, pour ce style qui, décidément, ne prend pas une ride.

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